ANOREXIE MENTALE [angl. anorexia nervosa, all. Pubertâtmgersucht, esp. anorexia mental].


Déflinition-Historique : Aucune affection n'a reçu au fil du temps autant (le dénominations différentes traduisant les conceptions théoriques suc cessives proposées pour l'expliquer que celle que nous nommons anorexie mentale. La première observation remonte à 1689 où Richard Morton parlait d'atrophie nerveuse. Mais les descriptions modernes sont celles


18


Anorexie mentale


qu'en firent en 1873 Lasègue dans son article sur l'anorexie hystérique, et en 1874 Gull dans celui sur l'anorexia nervosa, nom qu'elle a gardé en anglais, alors qu'en France Huchard proposa en 1883 de substituer à l'adjectif d'hystérique celui de mentale pour la séparer de la grande névrose et en faire ainsi une entité autonome. Janet (~903) disting e une anorexie hystérique et une anorexie due aux obsessions (Pobsession de la honte du corps a préfiguré la notion d'altération de l'image du coms). Deierine et Gauckler (1913) font eux la différence entre l'anorexie


mentale primaire et les anorexies des états dépressifs et psychotiques. La description en 1914 par Simmonds de la cachexie hypophysaire t pendant un quart de siècle confondre l'anorexie mentale avec les maladies endocriniennes. Après la guerre, l'anorexie mentale est considérée comme une maladie psycho-somatique où le diencéphale joue un rôle essentiel agissant sur les deux versants de cette endocrino-névrose juvénile (Delay) ou de cette cachexie psycho-endocrinienne de l'adolescence (Decourt). L'ère contemporaine débute avec l'interprétation psychanalytique des perturbations de l'image du corps qui a failli faire basculer l'anorexie mentale du côté des psychoses en faisant d'elle une psychose sans délire ou un délire du corps (Selvini 1963) avec clivage de l'image du corps en un corps idéalisé, objet de désir, et un corps réel, objet de dénégation. C'est alors qu'aurait pu être critiqué le terme d'anorexie - du grec ct privatif, et o@F,~Lg appétit - puisqu'il ne s'agit pas ici d'une véritable perte d'appétit, la restriction alimentaire ayant pour but d'obtenir l'amaigrissement exigé par cette image déformée du corps propre, sorte d'hallucination négative, la dénomination allemande du tableau, dési de maigreur à la puberté, le désigne de manière beaucoup plus exacte.

Ces dernières années deux faits cliniques ont été réenvisagés à la lumière des théories actuelles. Le premier est celui du rôle primordial joué par. les relations familiales dans la génèse de ce trouble, déjà souligné par Gull et qui avait conduit à préconiser empiriquement l'isolement de l'anorexique comme première mesure thérapeutique ; l'approche systémique a conduit à des thérapies familiales faisant de la restriction alimentaire le mode de communication imposé par un certain type de fonctionnement familial. Le second est celui de l'alternance de la restriction alimentaire avec des épisodes de boulimie, d'hyperorexie avec vomissements, décrite comme une des possibilités évolutives de l'anorexie qui peut se transformer en son contraire. C'est ici le comportementalisme qui a amené à inclure l'anorexie mentale dans le cadre plus vaste des troubles des conduites alimentaires. Le recours pour obtenir l'amaigrissement à des laxatifs ou à des substances anorexigènes pose enfin la question des limites avec les toxicomanies.


INSERM : La rubrique .5 Anorexies et autres troubles des conduites


Anorexie mentale


19


alimentaires (faim, soif) figure dans la catégorie 15 Troubles isolés non classables ailleurs.


CI M 9 : La catégorie 307 Symptômes ou Troubles spéciaux non classés ailleurs. Elle comprend deux rubriques qui concerne l'alimentation :

- .1 Anorexie mentale : L'anorexie mentale est considérée plutôt comme un trouble pouvant être associé à divers états psychopathologiques non spécifiés que comme une entité autonome.

- .5 Troubles de l'alimentation, autres et non précisés : « Boulimie, perte d'appétit, pica, troubles de l'alimentation de l'enfant, vomissements psychogènes d'origine non organique ».

L'obésité simple figure à la rubrique 278 (chapitre III Maladies endocriniennes, de la nutrition et du métabolisme). Dans la catégorie J05 Abus de drogues chez une personne non dépendante est mentionnée en .9 « Manie » des laxatifs. Enfin en 306 Troubles du fonctionnement physiologique d'origine psychique figure en .4 Vomissements périodiques psychogènes.


CIM-Proj. rév. : Une nouvelle catégorie est créée : Troubles de l'aliPpientation (F 50) dont les rubriques seraient : .0 Anorexie mentale, .1 lloulimie nerveuse, 4 Boulimies avec maintien du poids normal, .5 Ohésité associée à d'autres troubles psychologiques, .8 Autres troubles de l'alimentation.


1 ). S. M. III : La catégorie diagnostique Troubles de la première et deuxième etilànce, ou de l'adolescence comprend une sous-classe Troubles de l'alimentation qui distingue quatre troubles : 307.10 Anorexie mentale. .107.51 Boulimie définie comme des épisodes de « grande bouffe » avec conscience du caractère anormal de cette conduite alimentaire, peur de tic pas pouvoir s'arrêter volontairement de manger, humeur dépressive et auto-dépréciation après les accès ». Ces accès ne sont pas dus à une iiiiorexie mentale. Les deux autres rubriques correspondent à des troubles tares de l'enfance puisqu'il s'agit de 307.52 Le Pica et 307.53 Mérycisme de la petite enfance. Le regroupement de quatre troubles aussi différents dans une même sous-classe ne s'explique que par leur caractère commun général d'atteinte des conduites alimentaires. L'obésité simple ne figure pas dans cette classification car « elle n'est généralement pas associée à titi syndrome psychologique ou comportemental distinct » mais si pour titi cas particulier d'obésité il existe « des arguments en faveur de facteurs p%ychologiques importants dans l'étiologie ou l'évolution on peut l'indiquer en notant les facteurs psychologiques influençant une affection physique.


1).S.M. III-R : La taxinomie générale des Troubles de l'alimentation n'est pas modifiée. Mais en ce qui concerne l'anorexie mentale, le critère diagnostique d'une perte de poids d'au moins 25 % du poids d'origine feconnu trop restrictif a été modifié ; en outre a été ajouté comme


Autisme


nouveau critère une aménorrhée d'au moins trois mois. Quant à la boulimie elle est désormais qualifiée aussi de nervosa pour souligner les liens étroits avec l'anorexie ; les critères diagnostiques révisés exigent une fréquence minimum pour les accès mais ne requièrent plus ni l'humeur dépressive, ni l'auto-dépréciation après les accès qui sont désormais considérés comme des traits associés.


Dernière mise à jour : dimanche 4 novembre 2001 16:04:16
Dr Jean-Michel Thurin