ALCOOLISME CHRONIQUE (troubles mentaux dus à l') liangl. alcoholisme, all. Alkoholisme, esp. alcoholismo].


I)éflnition-Historique : Depuis qu'en 1982 Magnus Huss a proposé le terme d'alcoolisme - d'alcohol, esprit de vin, lui-même de l'arabe alkohol - pour désigner les manifestations pathologiques consécutives à l'intoxication par l'alcool éthylique, s'est posée la question de la nosographie des troubles mentaux qui lui sont dus. L'emploi des adjectifs aigu/chronique paraît introduire une distinction entre ce qui ne serait (lu'une forme d'intoxication aiguë, l'ivresse, et ce qui serait véritablement pathologique, l'alcoolisme chronique. Il est habituel, de décrire en les %éparant schématiquement, d'une part, des troubles neuro-psychiatriques


consécutifs à l'alcoolisation et, d'autre part, des particularités de la personnalité ou des circonstances susceptibles d'expliquer cette intoxication. Si un consensus existe à propos de la première partie de cette description, il n'en est pas de même en ce qui concerne la seconde ; c'est pourtant elle qui devrait la véritable définition psychiatrique de l'alcoolisme.

Le terme « délirium tremens » a été employé pour la première fois par Sutton en 1813 (avant même donc qu'on ne parle d'alcoolisme) mais il a fallu attendre Lasègue (1881) pour que l'on reconnaisse qu'il s'agit d'un délire confuso-onirique*. D'autres manifestations psychopathologiques ont tôt été classées comme des complications de l'alcoolisme chronique, ainsi la psychose hallucinatoire* alcoolique ou le délire de jalousie* des buveurs. Korsakov a décrit la psychose polynévritique dès 1867 et à cette époque l'encéphalopathie que nous nommons en France (le Gayet-Wernicke était elle aussi isolée. Quant aux évolutions démenlielles, considérées comme constantes par les auteurs classiques dès 1903 Marchiafava et Bignami avaient décrit la nécrose du corps calleux caractéristique du syndrome ou de la maladie qui porte leurs noms et associée plus tard à la sclérose laminaire de la 3e couche du cortex décrite par Morel en 1939. Mais en ce qui concerne la psychopathologie pendant longtemps on s'est contenté de la distinction entre alcoolisme priniaire, culturel et alcoolisme secondaire ou alcoolisme névrotique. En Vrance, Fouquet a proposé en 1952 la classification en :

- alcoolites correspondant à l'alcoolisme primaire ou culturel

alcooloses ou névroses alcooliques ;

somatoalcooloses où interviennent des facteurs organiques notamment endocriniens et qui incluent certains cas de dipsomanie.


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Alcoolisme chronique (troubles mentaux dus à l')


Aux U.S.A. Jellinek a proposé une autre classification (1960) en :

- ct dépendance purement psychique sans perte de contrôle (évolution possible vers y).

- ~ aucune dépendance psychique ou physique, donc d'habitude, avec complications somatiques (évolution possible vers y et 6).

_ y dépendance ' sychique évoluant vers la dépendance physique

(peut succéder à ~. et~`ffl.

- ô aucune dépendance psychique avec dépendance physique, fréquence des délires confuso-oniriques* (peut succéder à

- F, dipsomanie.

Mais quel est le mécanisme de la dépendance psychique ? Le terme dipsomanie - du grec bitpct, soif - apparu en 1864 qui en désigne la forme extrême évoque une monomanie, une folie partielle. Celui d'alcoolomanie, plus récent suggère un rapprochement avec les toxicomanies. La question est de savoir si l'on peut considérer l'alcool comme une drogue engendrant la toxicomanie ce qui détermine la taxinomie de l'alcoolisme. La définition de Fouquet « est alcoolique tout individu qui a perdu la liberté de s'abstenir de l'alcool » est en général retenue en France. Dans notre pays, les auteurs d'orientation analytique se sont efforcés de situer l'alcoolisme dans la nosologie psychanalytique, et plutôt que d'y voir une des trois structures psychopathologiques classiques, font une analogie entre l'apsychognosis, faisant de ce symptôme décrit par Fouquet un mécanisme métapsychologique, et la pensée opératoire décrite par l'école de Pàris dans les troubles psychosomatiques*.

INSERM : L'alcoolisme est partagé en deux catégories 05 Psychoses -1,-oli,ues oui détaille les différentes entités cliniques et 12 Alcoolismes


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chroniques .0 Simple (sans aucune autre référence noso og que), .

à un état névrotique caractériel, .2 liés à un état psychotique, .3 conduites alcooliques intermittentes Dipsomanie alcoolique. On fait remarquer que « l'alcoolisme chronique non compliqué pose des problèmes de classi

fication analogues à ceux des perversions et des toxicomanies ». Les ivresses simples sans notion d'alcoolisme chronique sont classées en 20 Troubles non classables.


CIM 9 : Au chapitre V cette pathologie est aussi divisée en deux :

1. 291 Psychoses alcooliques : .0 Delirium tremens. Etat délirant aigu ou subaigu alcoolique. .1 Psychose de Korsakov* alcoolique. (Cette classification code l'encéphalopathie de Gayet-Wernike seule au chapitre III Maladies endocriniennes, de la nutrition et du métabolisme en 265 Carence en thiamine et niamine, et la maladie de MarchiafavaBignami au chapitre VI, 341.8 Autres maladies démyélinisantes du système nerveux.) .2 Autres démences alcooliques. .3 Autres états hallucinatoires chroniques qui correspond à l'hallucinose des buveurs de Wernicke. .4 Ivresse pathologique. .5 Délire chronique de jalousie*.


Alcoolisme chronique (troubles mentaux dus à l)


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2) 303 Syndrome de dépendance alcoolique ainsi défini : « Etat psychique et habituellement aussi physique, résultant de l'absorption d'alcool, caractérisé par des réactions de comportement et autres comprenant toujours un besoin compulsif de prendre de l'alcool de façon continue ou périodique afin d'en éprouver les effets psychiques et parfois de %upprimer le malaise consécutif à l'abstinence ; il peut y avoir ou non accoutumance ». Alcoolisme chronique, dipsomanie et ivresse aiguë chez un alcoolique sont donnés comme synonymes. La définition proposée montre que l'alcoolisme chronique est considéré comme un comportement (léterminé par une dépendance comparable à celle provoquée par d'autres drogues.


1).S.M. III : L'alcool est représentée au même titre que d'autres subsiiinces dans deux catégories : Troubles mentaux organiques induits par tics substances toxiques ; Troubles liés à l'utilisation de substances toxiques (cn anglais Substance Use Disorder). Les Troubles mentaux organiques


alcooliques comprennent 7 rubriques : 303. 00 Intoxication alcoolique qui correspondent à l'ivresse non pathologique où cependant le comportement est déjà inadapté. 291.40 Intoxication alcoolique idiosyncrasique correspondant elle à l'ivresse pathologique. L'adjectif idiosyncrasique montre que le caractère pathologique est attribué à la réaction individuelle et non à l'intoxication elle-même. Les mots « ivresse » ou « ébriété » sont évités mais la démarche est qualifiée d'ébrieuse. 291.80 Syndrome de vevrage alcoolique. 291.00 Delirium de sevrage alcoolique. 291.30 Etat hallucinatoire alcoolique. 291.10. Trouble amnésique alcoolique. Il s'agit là, bien entendu du syndrome de Korsakov*. 291.2x Démence associée à un alcoolisme. Ici contrairement aux données classiques « le rôle étiologique de l'alcool dans la Démence, associé à un usage prolongé et massif d'alcool est controversé ». Il s'agit là d'une rubrique correslx)ndant à un diagnostic d'élimination lorsque les autres causes de démence ont été exclues et même dans ce cas l'alcoolisme chronique n'est retenu que comme association. La maladie de Marchiafava Bignami et la sclérose himinaire de Morel ne sont pas mentionnées. Les troubles liés à l'utilisation de substances toxiques comprennent pour ce qui est de l'alcool : 305.Ox Abus d'alcool et 303.9x Dépendance à l'alcool. La caractéristique essentielle de l'abus d'alcool est un mode de consommation pathologique (1';tlcool entraînant un handicap social ou professionnel. A ces deux iiractéristiques s'ajoutent pour la dépendance des signes de tolérance ou de sevrage. Le D.S.M. III précise « La dépendance à l'alcool a aussi été appelée alcoolisme ». Le 5e chiffre code l'évolution : 1 chronique, -'épisodique, 3 en rémission.


1). S. M. III-R : La dépendance à l'alcool 303.90 et l'abus d'alcool 305.00 ,ont considérés comme devant être définis de façon plus extensive que l';tlcoolisme aux Etats-Unis ou les buveurs excessifs en France.


14 Alzheimer (maladie d')


Bibliographie : DESCOMBEY J.P. - Problèmes nosographiques posés par l'alcoolisme. Inf. psych., 63, 1, 1987, 53-63.


Dernière mise à jour : dimanche 4 mars 2001 0:24:10
Dr Jean-Michel Thurin