AIGUËS (psychoses délirantes) [angl. acute delusional psicosis, all. Amentia].


Définition-Historique : L'esprit humain a du mal à accepter l'idée que les altérations majeures de son fonctionnement puissent être limitées dans le temps, que nous puissions subitement devenir fous puis redevenir sensés, car admettre que la folie peut être brève, c'est reconnaîÎtre que la frontière qui nous en sépare est bien facile à franchir. Nous avons moins de peine à concevoir que lorsqu'une maladie mentale nous fait perdre l'esprit, cette perte se fasse progressivement et qu'elle soit définitive, car dans ce cas la démarcation entre la vie et la mort psychique nous apparaîît aussi irréversible que celle qui sépare la vie de la mort. Ce sont surtout les perturbations transitoires de l'activité noétique qui


Aiguës (psychoses délirantes)


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sont difficile à concevoir. Il est plus aisé d'admettre que des troubles mentaux liés à des variations thymiques évoluent par accès. On comprend pourquoi, malgré l'évidence de leur réalité clinique, les psychoses délirantes aiguës trouvent si difficilement place dans les nosographies. L'école française a distingué le délire aigu symptomatique dès sa naissance, « De lit folie » de Georget (1820), mais elle n'a pas cherché à le classer. Aussi lui a-t-il été facile en se basant sur deux seuls critères séméiologiques - le caractère délirant et l'acuité - d'admettre côte à côte d'autres états, bouffée délirante polymorphe*, confusion* mentale primitive, etc., au fur et à mesure qu'ils étaient décrits. Par contre, l'école allemande, et en particulier Kraepelin avec sa classification systématique mixte combinant modalités évolutives et facteurs étiologiques, aura bien du mal à situer exactement ces psychoses délirantes aiguës. Encore de nos jours, même lorsque leur existence est admise, elles ne sont pas reconnues comme des entités cliniques spécifiques, et c'est en référence à d'autres notions psychopathologiques ou à d'autres états, par exemple en les considérant comme des formes de réactions* non spécifiques, ou, ce qui est sans doute la position la plus paradoxale comme les formes aiguës (le psychoses chroniques qu'elles sont classées. La distinction aigu/ chronique ne correspond pas en pathologie qu'à une simple différence (le durée mais aussi de nature. Parler de schizophrénie aiguë est un non-sens non seulement parce que les formes délirantes des 1;sychoses schizophréniques* sont des délires chroniques*, mais aussi parce que cela montre que n'a pas été saisie la spécificité des psychoses délirantes aiguës. Ce sont elles qui nous montrent le plus clairement la psychogénèse (lu délire. Pour Freud, « dans l'amentia de Meynert..., peut-être la forme (le psychose la plus extrême et la plus frappante, ou bien le monde extérieur n'est pas du tout perçu, ou bien sa perception reste complèlement inopérante... le moi se crée automatiquement un nouveau monde, extérieur et intérieur à la fois... bâti selon les désirs du çà, et le motif (le cette rupture avec le monde extérieur, c'est que la réalité s'est refusée au désir d'une façon grave, apparue comm . intolérable ». Le déni (Verleugnung) de la réalité s'accompagne d'un clivage du moi (Ichspaltung) décrit primitivement dans le fétichisme*. La psychose hallucinatoire de déni nous dévoile les productions de l'inconscient et on peut presque s'étonner qu'il ait fallu le long détour de l'analyse des rêves et (les névroses pour les découvrir alors que la clinique offrait à l'observation cette vision directe du monde intérieur. Le mécanisme décrit par Freud peut se traduire par des tableaux divers qui sont cependant tous caractérisés par l'importance qu'y prennent les phénomènes de dépersonnalisation* et de &réalisation*. Pour Ey, ces phénomènes correspondent à « une forme pathologique de la conscience caractérisée par


la structure temporo-spatiale des relations du moi et du monde ».


10 Aiguës (psychoses délirantes)


INSERM : Dans la catégorie diagnostique 04 Psychoses délirantes aiguës c

hses
et états confusionnels « doivent être classés tous les cas de psy

délirantes aieuës ou d'états confusionnels, non symptomatique d'une


. 1 A i.-les délirants aigus


étiologie organique demonirable, y co-1- - 1,

considérés comme schizophréniques (schizophrénies aiguës) ». .0 Accès délirant aigu bu subaigu considéré comme schizophrénique. Schizophrénie aiguë ; .1 Psychose délirante aiguë réactionnelle. Bouffée délirante réactionnelle ; .2 Psychose délirante aiguë, bouffée délirante ; .3 Etat confusionnel ou confuso-onirique réactionnel ; .4 Etat confusionnel ou confusoonirique non-réactionnel. Par conséquent--p--Our cette classification les psychoses aiguës se caractérisent d'abord par le fait qu'elles ne sont pas

; ues -suite aussi bien pour les bouffées* délirantes que pour


organ ci ;


les états confusionnels* par l'existence de formes en quelque sorte symétriques réactionnelles ou primitives.

CIM 9 : Il est dit de la catégorie 298 Autres psychoses non organiques

« les rubriques 298.0, 298.8 ne doivent être utilisées que pour le petit nombre d'états psychotiques dont l'origine est principalement ou entièrement: attribuable à une expérience vécue récente ». Par conséquent ces autres psychoses non organiques sont considérées comme rares et exclusivement réactionnelles ou psychogènes.


CIM-Pr*oj. rév. : La rubrique F 23 « Troubles psychotiques aigus » et transitoires : est définie comme un « groupe hétérogène de troubles caractérisés par un début aigu (tableau clinique se développant en moins de deux semaines), la présence de symptômes psychotiques bien définis tels que délires, hallucinations et perturbation importante du comportement, et un rétablissement complet dans un délai maximum de trois mois ».


D.S.M. III : Les psychoses délirantes aiguës ne sont admises que dans 1- T,,,,,hleS -ychotiques'non classés ailleurs, classe diagnostique définie


1, .; Il il; -

selon des critères négatifs : ce sont des troubles Vsy, - qu- ï peuvent être classés ni parmi les troubles mentaux organiques, ni parmi les troubles schizophréniques, parandiaques ou affectifs. Elle est hétérogène puisqu'elle regroupe trois catégories spécifiques : 295.40 Troubles schizophréniformes* ; 298.80 Psychose réactionnelle* brève ; 295.70 Trouble schizo-affectif (cette dernière étant en fait maintenue sans que en l'absence de consensus les critères diagnostiques puissent être définis) et une catégorie résiduelle 298.90 Psychose atypique où l'on retrouve par exemple les psychoses puerpérales*.

D.S.M. III-R : « L'acute paranoïd disorder » est classé dans cette rubrique.

Bibliographie : Ey H. - La classification des maladies mentales et le problème


Alcoolisme chronique (troubles mentaux dus à 1)


il


des psychoses aiguës. Etude n' 20,
11rouwer, Paris, 1954.
FRE.UD S. - Névrose et psychose (1924). Traduction française, in : Névrose,
1,sychose et perversion, P.U.F., Paris, 1973.


in : Etudes psychiatriques, T. III, Desclée de


Dernière mise à jour : dimanche 4 novembre 2001 16:05:33
Dr Jean-Michel Thurin