SOMMAIRE

 

-       INTRODUCTION. P4

-       DEFINITION ET APPROCHE CLINIQUE. P6

1-   Etat de stress aigu. P8

2-   Etat de stress post-traumatique. P9

 

-       APPROCHE THEORIQUE : INSUFFISANCE DE LA CONNAISSANCE DE LA REACTION DE STRESS. P11

 

I-DŽfinition du facteur de stress ou stresseur. P12

II-Symptomes dissociatifs. P13

III-Reviviscence des symptomes. P16

IV-Les symptomes dՎvitements P17

V-Les symptomes de vigilance accrue. P18

VI-Les critres de durŽe. P18

VII-Comparaison de lÕE.S.A. et du E.S.P.T. P19

VIII-Mesure des troubles de stress aigu. P21

IX-Conclusion. P23

 

-CAS CLINIQUE : PARTIE I P24

- ELEMENTS SEMIOLOGIQUES. P31

- ENQUETE SEMIOLOGIQUE ( TABLEAUX-HISTOGRAMME-INTERPRETATION). P38

- COMPORTEMENT SELON LES PERSONNES ET SELON LES CULTURES. P56

-CAS CLINIQUE : PARTIE II P60

CONSEQUENCES A MOYEN ET A LONG TERME.

 

-REACTION DE DEUIL. P72

 

-APPROCHE CULTURELLE. P78

 

-CONCLUSION. P85

-REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES. P87

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  LÕexpŽrience traumatique aigu‘ vŽcue par les familles qui perdent brutalement leurs proches dans une catastrophe ou un accident, peut entra”ner un Žtat de stress post-traumatique.

 

                  En effet, lÕenqute de DŽtroit (BRESLAU et All, 1998) a montrŽ que lՎvnement potentiellement traumatique le plus souvent rapportŽ est le dŽcs soudain et inattendu dÕun proche, avec un taux moyen dՎtat de stress post-traumatique de 14,3 % (1).

 

                  La notion de stress aigu et de stress post-traumatique reste floue et dÕun abord singulirement laborieux.

 

                  Les critres actuels de diagnostic dÕE.S.A. basŽ sur des propositions thŽoriques font lÕobjet de critiques, par leurs insuffisances et leurs manques de recherches empiriques.

 

                  La relation de cause ˆ effet entre les critres diagnostiques dÕE.S.A. Š dissociation, sympt™mes de reviviscence, dՎvitement et de vigilance, et la survenue ultŽrieure dÕun E.S.P.T. nÕest pas encore clarifiŽe.

 

                  A lÕheure actuelle, peu dՎtudes soulignent le lien direct entre lÕE.S.A. et lÕE.S.P.T. et, par consŽquent, certains auteurs sՎlvent pour dŽnoncer la restriction des critres DSM IV.

 

                  Ce travail, aprs rappel clinique et thŽorique du concept dՎtat de stress aigu, va tenter une approche de cette entitŽ clinique ambigu‘ qui nÕa cessŽ de susciter des controverses.

 

                  La seconde partie du mŽmoire est consacrŽe aux consŽquences de lÕE.S.A. ˆ moyen et ˆ long terme, ˆ la rŽaction de deuil et de son vŽcu, que je citerai par une approche culturelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DEFINITION ET

APPROCHE CLINIQUE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  La notion de stress, proposŽe en anglais par lÕendocrinologue canadien HANS SELYE en 1936, appartient dÕabord au domaine de la biologie et de la psychologie.

 

                  En franais, le mot, comme son Žtymon, dŽsigne la rŽponse de lÕorganisme aux facteurs dÕagression physiologique et psychologique, ainsi quÕaux Žmotions qui nŽcessitent une adaptation (2).

 

                  Le stress est donc la rŽaction bio-physio-psychologique immŽdiate dÕalarme, de mobilisation et de dŽfense de lÕindividu face ˆ une agression ou une menace.

 

                  CÕest une rŽaction utile, adaptative, inspirant au sujet des attitudes spontanŽes dÕalerte, de dŽfense ou de retrait. Elle est grevŽe de sympt™mes neurovŽgŽtatives (tachycardie, ŽlŽvation de la tension artŽrielle, p‰leur, spasmes viscŽraux) et de dŽpense dՎnergie avec Žpuisement physique et psychique.

 

                  En outre, si elle est trop intense, trop prolongŽe ou rŽpŽtŽe ˆ de trop courts intervalles, elle se mue en rŽaction inadaptation de stress dŽpassŽ, tels que sidŽration agitation, fuite panique ou comportement dÕautomate (3).

 

                  La rŽaction de stress peut tre dŽcomposŽe en deux phases :

 

         - la phase immŽdiate qui survient au moment mme de lՎvnement et ne dŽpasse pas une durŽe de quelques heures et ou lÕon peut observer, mis ˆ part le cortge de sympt™mes neurovŽgŽtatifs qui accompagnent le stress normal, des rŽactions de stress dŽpassŽ,

         - la phase post-immŽdiate qui correspond, soit au retour ˆ lՎtat normal, soit ˆ la mise en place de nouvelles dŽfenses se manifestant, soit par des dŽcharges Žmotionnelles, soit par lÕinstallation torpide dÕun syndrome psychotraumatique.

 

                  La classification internationale des maladies Žtablie par lÕO.M.S., qui comprend les troubles mentaux et du comportement, est la seule classification internationale officielle. Sa dixime rŽvision Š CIM 10 Š parue en 1992, reconna”t trois entitŽs diagnostiques pour les syndromes psychotraumatiques :

 

         - la rŽaction aigu‘ ˆ un facteur de stress : elle concerne la phase immŽdiate et qui dispara”t habituellement en quelques heures, ds que le sujet nÕest plus soumis ˆ un facteur de stress.

En cas de persistance des facteurs de stress, cette phase peut persister jusquՈ deux ou trois jours.

 

Ses principaux critres sont lՎtat dÕhŽbŽtude initial caractŽrisŽ par un rŽtrŽcissement du champ de la conscience et de lÕattention, la dŽsorientation et les sympt™mes neurovŽgŽtatifs.

Cet Žtat peut tre suivi dÕun retrait croissant vis-ˆ-vis de lÕenvironnement pouvant aller jusquՈ une stupeur dissociative, dÕune agitation avec hyperactivitŽ et rŽaction de fuite.

On y trouve en fait les caractŽristiques et les variantes de la rŽaction de stress dŽpassŽ (3).

         - lՎtat de stress post-traumatique : les troubles peuvent appara”tre quelques semaines ˆ quelques mois aprs la survenue du traumatisme.

En dehors de la symptomatologie clinique calquŽe ˆ peu prs sur le P.T.S.D. amŽricain, la CIM 10 mentionne des facteurs prŽdisposants : traits de personnalitŽ (compulsive, asthŽnique, É), ou des antŽcŽdents de type nŽvrotique qui peuvent favoriser la survenue du syndrome ou aggraver son Žvolution.

         - la modification durable de la personnalitŽ secondaire ˆ une expŽrience de catastrophe doit persister au moins deux ans.

Le trouble se caractŽrise par une attitude hostile ou mŽfiante envers le monde, un retrait social, des sentiments de vide ou de dŽsespoir (3).

 

                  Dans le DSM IV (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) paru en 1994 (4), les diagnostics dÕE.S.A. et dÕE.S.P.T. reposent sur un ensemble de critres.

 

1 Š Etat de stress aigu

 

                  Le diagnostic dÕE.S.A. repose sur cinq critres :

 

         - le premier critre (A) dŽfinit lՎvnement traumatique et la population ˆ risque : le sujet a vŽcu, a ŽtŽ tŽmoin ou a ŽtŽ confrontŽ ˆ un Žvnement ou ˆ des Žvnements durant lesquels des individus ont pu mourir ou tre trs gravement blessŽs. La rŽaction du sujet ˆ lՎvnement sÕest traduite par une peur intense, un sentiment dÕimpuissance ou dÕhorreur,

 

         - le deuxime critre (B) dŽcrit la dissociation qui doit tre attestŽe par trois ou plus des manifestations suivantes :

                  * sentiment de torpeur, de dŽtachement ou absence de rŽactivitŽ Žmotionnelle,

 

                  * rŽduction de la conscience,

                  * dŽrŽalisation,dŽpersonnalisation,

                 

                  * amnŽsie dissociative,

 

         - le troisime critre (C) concerne la reviviscence de lՎvnement traumatique, attestŽe par au moins une des manifestations suivantes :

                  * images,

                  * pensŽes,

                  * rves,

                  * illusions,

                  * flash-back rŽcurrents,

                  * sentiment de revivre lÕexpŽrience,

                  * souffrance lors de lÕexposition ˆ ce qui peut rappeler lՎvnement traumatique,

 

         - le quatrime critre (D) concerne lՎvitement persistant des stimuli qui Žveillent la mŽmoire du traumatisme (exemples : pensŽes, sentiments, conversation, activitŽs, endroits, gens),

 

         - le cinquime critre (E) dŽcrit les sympt™mes traduisant un Žtat dÕalerte permanent avec prŽsence de sympt™mes anxieux persistants ou manifestations neurovŽgŽtatives, difficultŽs dÕendormissement, irritabilitŽ, difficultŽs de concentration, hypervigilance, rŽaction de sursaut exagŽrŽe, agitation motrice.

 

                  Il est de plus spŽcifiŽ en (F) que la perturbation entra”ne une dŽtresse cliniquement significative ou une altŽration du fonctionnement social, professionnel ou dans dÕautres domaines importants. Et en (G), la durabilitŽ des troubles o la perturbation dure un minimum de deux jours et un maximum de quatre semaines (4).

 

2 Š Etat de stress post-traumatique

 

                  Le diagnostic dÕE.S.P.T. repose sur quatre ordres de critres :

 

         - le premier critre (A) dŽfinit lՎvnement traumatique et la population ˆ risque : le sujet a vŽcu, a ŽtŽ tŽmoin ou a ŽtŽ confrontŽ ˆ un Žvnement ou ˆ des Žvnements durant lesquels des individus ont pu mourir ou tre trs gravement blessŽs. La rŽaction du sujet ˆ lՎvnement sÕest traduite par une peur intense, un sentiment dÕimpuissance ou dÕhorreur,

 

         - le deuxime critre (B) concerne la reviviscence de lՎvnement traumatique, attestŽe par au moins une des cinq manifestations suivantes :

                  * souvenir rŽpŽtitif et envahissant de lՎvnement provoquant un sentiment de dŽtresse,

                  * rves rŽpŽtitifs provoquant un sentiment de dŽtresse,

                  * survenue secondaire de sentiments laissant pressentir que lՎvnement va se reproduire (sentiment de revivre lՎvnement, illusions, hallucinations et flash-back),

                  * Žtat de dŽtresse psychique intense lors dՎvnements rappelant le traumatisme initial,

                  * rŽactivitŽ physiologique lors des expositions ˆ des Žvnements rappelant le traumatisme initial,

 

         - le troisime critre (C) dŽcrit les comportements persistants dՎvitement des stimuli et lՎmoussement de la rŽactivitŽ qui doivent tre attestŽs par au moins trois des manifestations suivantes :

                  * effort pour Žviter les pensŽes, les sentiments ou les conversations associŽs au traumatisme,

                  * effort pour Žviter les activitŽs ou les situations qui font resurgir le souvenir de lՎvnement traumatique,

                  * incapacitŽ de se rappeler dÕun aspect important du traumatisme,

                  * rŽduction nette de lÕintŽrt portŽ ˆ des activitŽs antŽrieures,

                  * sentiment de dŽtachement dÕautrui ou bien de devenir Žtranger par rapport aux autres,

                  * retrait affectif,

                  * sentiment dÕavenir Ē bouchŽ Č,

 

         - le quatrime critre (D) dŽcrit les sympt™mes traduisant un Žtat dÕalerte permanent avec activation neurovŽgŽtative attestŽe par la prŽsence dÕau moins deux des manifestations suivantes :

                  * difficultŽs dÕendormissement ou sommeil interrompu,

                  * irritabilitŽ ou accs de colre,

                  * difficultŽs de concentration,

                  * hypervigilance,

                  * rŽaction de sursaut exagŽrŽe.

 

                  Il est de plus spŽcifiŽ que, en (E), la perturbation dure plus dÕun mois et que celle-ci entra”ne une souffrance cliniquement significative ou une altŽration du fonctionnement social, professionnel ou dans dÕautres domaines importants (F) (4).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

APPROCHE THEORIQUE

INSUFFISANCE DE LA CONNAISSANCE DE LA REACTION DE STRESS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  LՎtat de stress aigu (E.S.A.) est un diagnostic dŽveloppŽ rŽcemment qui dŽcrit les rŽactions de stress post-traumatique qui apparaissent dans le mois qui suit un traumatisme.

 

                  Les critres diagnostiques incluent les sympt™mes dissociatifs, dÕintrusion, dՎvitement et de vigilance.

 

                  Au regard des recherches montrant les relations entre lՎtat de stress aigu (E.S.A.) et lՎtat de stress post-traumatique (E.S.P.T.), lÕE.S.A. est considŽrŽ comme un ŽlŽment prŽdictif dÕune psychopathologie post-traumatique sur le long terme (CLASSEN, KOOPMAN, SPIEGEL et CARDENA).

 

                  Il existe des diffŽrences thŽoriques au niveau diagnostique entre la conceptualisation de lՎtat de stress aigu (E.S.A.) dans le D.S.M. IV et celle de lՎtat de stress post-traumatique (E.S.P.T.).

 

                  LÕE.S.P.T. se distingue de lÕE.S.A. par lÕaccent mis sur les sympt™mes dissociatifs.

 

                  LՎtat de stress aigu est reprŽsentŽ dans le D.S.M. IV comme Žtant le niveau de dŽtresse le plus ŽlevŽ que peuvent rencontrer les individus dans une expŽrience traumatique aigu‘ (5).

 

 

I Š DEFINITION DU FACTEUR DE STRESS OU STRESSEUR

 

                  Le facteur de stress peut tre dŽfini de faon objective et subjective.

 

                  Dans la dŽfinition objective, le critre diagnostique de lՎtat de stress aigu nŽcessite que le sujet ait vŽcu ou ait ŽtŽ tŽmoin dÕun Žvnement qui, soit lÕa menacŽ, soit que des individus aient ŽtŽ menacŽs. La rŽaction du sujet ˆ lՎvnement se traduit par une peur intense, un sentiment dÕimpuissance ou dÕhorreur (American Psychiatric Association : A.P.A., 1994, p. 431).

 

                  Dans la dŽfinition subjective, le premier sympt™me citŽ dans le D.S.M. IV est lÕhŽbŽtude ou dŽtachement ou absence de rŽactivitŽ Žmotionnelle (A.P.A., 1994, p. 432).

 

                  Dans la phase aigu‘ du traumatisme, parfois la rŽponse Žmotionnelle nÕest pas retrouvŽe ; cette absence de rŽaction ne va donc pas satisfaire aux critres diagnostiques de lÕ     E.S.A., ce qui peut conduire, par rŽfŽrence au D.S.M IV, ˆ de faux nŽgatif au niveau diagnostic.

                  Ce qui est suggŽrŽ, cÕest de modifier la description de la rŽponse au stresseur pour inclure des manifestations comportementales de dŽtresse (comme lÕabsence de rŽponse ou le dŽtachement) qui pourraient ainsi rŽconcilier jusquՈ un certain point lÕanomalie des rŽponses dissociatives et la nŽcessitŽ que lÕindividu rŽponde avec une rŽaction de peur ou dÕimpuissance (5).

 

 

II Š SYMPTOMES DISSOCIATIFS

 

1 - Perspectives thŽoriques sur la dissociation

 

                  Le trait distinctif de lՎtat de stress aigu repose sur le fait que lÕon met lÕaccent sur la rŽaction dissociative au traumatisme.

 

                  Le diagnostic de stress aigu requiert que lÕindividu ait au moins trois des sympt™mes suivants :

 

         - un sens subjectif dÕhŽbŽtude ou de dŽtachement,

         - une rŽduction de la conscience de lÕenvironnement,

         - une dŽrŽalisation,

         - une dŽpersonnalisation,

         - une amnŽsie dissociative.

 

                  La thŽorie sous-jacente ˆ lՎtat de stress aigu sous entend que la dissociation est un mŽcanisme de coping primaire afin que lÕindividu puisse gŽrer lÕexpŽrience traumatique, thŽorie de Ē la dissociation Č dont on peut trouver les premiers dŽveloppements en 1907 chez JANET.

 

                  Cette thŽorie propose que les individus minimisent les consŽquences Žmotionnelles liŽes au traumatisme en restreignant leur conscience de lÕexpŽrience traumatique (VAN DER KOL ET VAN DER HART, 1989), rŽduction de la conscience qui peut se manifester par une altŽration de la perception, par des troubles de la mŽmoire ou par un dŽtachement Žmotionnel de lÕenvironnement (CARDENA et SPIEGEL, 1993).

 

 

                  Le r™le de la rŽponse dissociative a ŽtŽ rŽcemment intŽgrŽ dans les modles de rŽseau cognitifs du E.S.P.T. (FOA et HEARST IKEDA, 1996).

 

                  Selon FOA et KOZAK en 1986, ces modles en rŽseau sont secondaires ˆ un traumatisme et les structures de peur qui se dŽveloppent contiennent des reprŽsentations mentales de lÕexpŽrience traumatique caractŽrisŽes par des croyances excessives reliŽes ˆ la menace.

 

                  Il est proposŽ que ces rŽseaux de la peur rŽsultent de la dŽviation de lÕattention sur les croyances excessives liŽes ˆ la menace et puisse expliquer par lˆ les sympt™mes post-traumatiques comme la mŽmoire intrusive, lÕhypervigilance et lՎvitement.

 

                  FOA et HEARST IKEDA en 1996, avaient proposŽ que la rŽponse dissociative initiale puisse empcher lÕactivation des structures de peur et que cette altŽration de processus Žmotionnelle puisse conduire ˆ une E.S.P.T. chronique (5).

 

2 Š Les arguments empiriques concernant la dissociation

 

                  Beaucoup dÕauteurs rapportent les sympt™mes dissociatifs observŽs pendant la phase aigu‘ du traumatisme tels quÕun sentiment dÕhŽbŽtude, une rŽduction de la conscience de son propre environnement, une dŽrŽalisation o lÕenvironnement devient irrŽel ou semblable au rve, une expŽrience de dŽpersonnalisation et une amnŽsie dissociative.

 

                  HOROWITCH en 1986 a toutefois argumentŽ le fait que les rŽponses dissociatives sont communes et potentiellement adaptatives, quÕelles sont des rŽactions ˆ court terme ˆ un traumatique et peuvent ultŽrieurement conduire ˆ une rŽsolution adŽquate de lÕexpŽrience traumatique. Une raison majeure pour mettre lÕaccent sur les sympt™mes dissociatifs dans les diagnostics de stress aigu et la portŽe avec laquelle ils prŽdisent la survenue dÕune P.T.S.D..

 

                  De nombreuses Žtudes ont en effet rapportŽ que la rŽaction dissociative au moment du traumatisme est prŽdictive dÕun diagnostic de P.T.S.D. (HOLEN, KOOPMAN, MARMAR, MAC FARLAN, SHALEV).

 

                  Il faut reconna”tre toutefois que la plupart de ces Žtudes ont collectŽ les faits sur la rŽaction dissociative aigu‘ de manire rŽtrospective, et cette mŽthodologie amne ˆ poser de sŽrieux doutes de savoir jusquՈ quel point la symptomatologie prŽsentŽe au moment de lÕentretien a pu influencer de manire rŽtrospective le compte-rendu des rŽactions traumatiques initiales.

 

                  On sait que la tendance de la mŽmoire des traumatismes ˆ changer au cours du temps est bien documentŽe (FOA et ALL, 1995 ; WAGENER et GROENEWEG, 1990).

 

                  En 1997, SOUTHWICK, MORGAN, NICOLAON et CHARNEY soulignent que la distorsion de la mŽmoire pour les Žvnements traumatiques est influencŽe par la symptomatologie mme de lÕE.S.P.T., dÕo la nŽcessitŽ de recourir ˆ des Žtudes prospectives.

 

                  Trois Žtudes prospectives ont rŽcemment ŽtudiŽ la relation entre les sympt™mes dissociatifs initiaux et lÕE.S.P.T..

 

                  Bien que KOUPEMAN et Al nÕaient pas diagnostiquŽ dÕE.S.A., les sympt™mes dissociatifs aigus ont mieux prŽdits ˆ la survenue dÕun E.S.P.T. que lÕanxiŽtŽ initiale.

 

                  En conclusion, bien quÕil y ait des indications initiales qui suggrent une relation entre la dissociation pŽri-traumatique et lÕE.S.P.T., il y a encore un manque de faits empiriques qui peut dŽmontrer que lÕE.S.P.T. est directement liŽ aux E.S.A..

 

                  Des Žtudes prospectives ultŽrieures sont nŽcessaires qui puissent prŽciser les relatifs pouvoirs de chacun des sympt™mes du groupe de lÕE.S.A., afin de prŽdire lÕE.S.P.T. par la suite (5).

 

 

3 Š Ambigu•tŽ du r™le de la dissociation au niveau diagnostic

 

                  Le r™le de la dissociation dans lՎtat de stress aigu est compliquŽ par lÕambigu•tŽ de savoir quand appara”t la rŽponse dissociative.

 

 

                  Selon le D.S.M. IV, la rŽponse dissociative peut appara”tre, soit pendant, soit aprs lÕexpŽrience de lՎvnement qui a causŽ le stress. Ce cadre de temps trs flexible pour les sympt™mes dissociatifs est en contraste avec le fait que lÕon exige que lÕintrusion, lՎvitement, les sympt™mes de vigilance aient besoin dՐtre expŽrimentŽs comme des problmes persistants.

 

                  Les sympt™mes dissociatifs sont normalement transitoires et ne doivent pas empcher le processus Žmotionnel de lÕexpŽrience traumatique. Mais si la dissociation persiste, elle empchera lÕactivation des structures de la peur et, ˆ long terme, va contribuer ˆ la psychopathologie.

 

                  Il nÕy a pas assez dՎtudes empiriques pour pouvoir bien sŽparer la spŽcificitŽ des sympt™mes dissociatifs au niveau du diagnostic.

 

                  Un sympt™me dissociatif pourrait-il en couvrir un autre ? Il est possible que la rŽduction de la conscience et de lÕenvironnement dŽtŽriore lÕencodage de lՎvnement, causant ainsi chez lÕindividu lÕamnŽsie de lՎvnement.

 

                  Des Žtudes sont donc nŽcessaires afin dՎvaluer la sensitivitŽ et la spŽcificitŽ des sympt™mes aigus dissociatifs pour prŽdire par la suite un E.S.P.T.(5).

 

 

III Š REVIVISCENCE DES SYMPTOMES

 

1 Š R™le de la reviviscence dans lÕE.S.A.

 

                  Le diagnostic dÕE.S.A. dans le D.S.M. IV requiert que lՎvnement traumatique soit revŽcu au moins dÕune des faons suivantes : images ou pensŽes rŽcurrentes, rves, illusions, Žpisodes de flash-back ou lÕimpression de revivre lÕexpŽrience, ou alors une dŽtresse ˆ lÕexposition de la remŽmoration de lՎvnement traumatique (A.P.A., 1994, p. 432).

 

                  Les sympt™mes de reviviscence, selon CALHOUN et RESICK en 1993, ont souvent ŽtŽ reconnus comme les sympt™mes caractŽristiques de lÕE.S.P.T.. De faon similaire, elles ont ŽtŽ observŽes dans la phase aigu‘ du traumatisme (BRYANT et HARVEY, 1996 ; KILPATRICK et RESWICK, 1993 ; SHALEV, 1992).

 

                  Certains auteurs soulignent quÕil y a des arguments permettant dÕavancer que la reviviscence des sympt™mes dans la phase traumatique immŽdiate peut tre prŽdictive dÕun E.S.P.T. persistant. Selon le modle en rŽseau de la rŽponse traumatique, les intrusions initiales peuvent conduire ˆ un Žvitement de lÕactivitŽ qui empche lÕactivation et la modification du rŽseau de peur (CREAMER, BURGESS et PATTISON, 1992).

 

                  Ce modle suggrerait que lÕextension avec laquelle les intrusions initiales sont prŽdictives dÕun futur E.S.P.T., dŽpend en partie de la prŽsence de lՎvitement durant la phase aigu‘ du traumatisme.

 

 

2 Š Reviviscence de lÕE.S.A. et de lÕE.S.P.T.

 

                  Bien que la description des sympt™mes de reviviscence dans le diagnostic de lÕE.S.A. apparaisse similaire ˆ celle de lÕE.S.P.T., les deux groupes se diffŽrencient de deux faons importantes :

 

         - premirement, dans lÕE.S.P.T., la reviviscence des sympt™mes doit causer la dŽtresse individuelle, alors que dans lÕE.S.A., la rŽponse Žmotionnelle nŽgative aux pensŽes traumatiques ou aux images nÕest pas mentionnŽe. Certains faits permettent de penser que les individus varient de faon marquŽe dans leurs rŽponses subjectives aux souvenirs intrusifs du traumatisme.

 

         - deuximement, ˆ la diffŽrence de lÕE.S.P.T., le diagnostic dÕE.S.A. ne requiert pas de faon obligatoire la dŽtresse rŽsultant de la reviviscence du traumatisme. Le r™le de la reviviscence des sympt™mes dans la phase aigu‘ du traumatisme et leur contribution ˆ la persistance dÕun E.S.P.T. nÕest compris que partiellement (5).

 

 

IV Š LES SYMPTOMES DÕEVITEMENT

 

                  Dans la plupart des modles cognitifs de lÕE.S.P.T. (CREAMER et All, FOA et KOZAK, LITZ et KEANE), lՎvitement est conceptualisŽ comme la premire rŽponse aux pensŽes intrusives du traumatisme qui peut procurer un soulagement temporaire dans la mesure o le matŽriel traumatique est intŽgrŽ graduellement. Si, par contre, cela sÕexerce de manire excessive, il peut empcher les traitements Žmotionnels des souvenirs traumatiques.

 

                  Il est admis que les stratŽgies dՎvitement, quÕelles soient cognitives ou comportementales, peuvent altŽrer lÕopportunitŽ de pouvoir sÕattaquer au matŽriel traumatique et le solutionner. De ce fait, on thŽorise que lՎvitement est lÕun des premiers prŽdicateurs de lÕE.S.P.T. chronique.

 

                  Bien que le comportement dՎvitement dans lÕE.S.P.T. ait ŽtŽ rapportŽ tre prŽdictif de troubles permanents, la relation entre lՎvitement et les pensŽes intrusives appara”t trs complexe (BRYANT et HARVEY, SCHWARTZ et KOWALSKI, SOLOMON, MIKULINCER et FLUM).

 

                  En rŽsumŽ, les travaux disponibles suggrent que la persistance de lՎvitement est associŽe ˆ lÕE.S.P.T., la relation entre lՎvitement initial et les E.S.P.T. ultŽrieures nÕest pas comprise de manire adŽquate (5).

 

 

 

V Š LES SYMPTOMES DE VIGILANCE ACCRUE

 

                  Le diagnostic dÕE.S.A. requiert quÕune vigilance accrue soit prŽsente pendant au moins deux jours aprs le traumatisme. Les sympt™mes de vigilance comprennent agitation, insomnie, hyper vigilance, difficultŽs de concentration et irritabilitŽ.

 

                  WEISAETH, en 1989, a trouvŽ que la persistance de lÕanxiŽtŽ et des troubles du sommeil aprs les deux premires semaines post-traumatiques Žtait prŽdictive dÕun E.S.P.T. par la suite.

 

                  DÕautres auteurs ont commentŽ, ˆ partir dÕune perspective thŽorique, lÕimportance potentielle des sympt™mes de vigilance initiaux dans la prŽdiction dÕE.S.P.T. par la suite (SHALEV, 1992).

 

                  Le r™le des sympt™mes de vigilance aigus dans la prŽdiction dÕE.S.P.T. nÕont reu, de manire surprenante, que peu dÕattention au niveau des faits empiriques. MAC FARLANE, en 1992, ajoute que, finalement, lÕinsistance mise sur les sympt™mes dÕintrusion et dՎvitement ont conduit ˆ ce que la notion de vigilance soit nŽgligŽe par de nombreux chercheurs. Il est impŽratif que des recherches ultŽrieures clarifient le r™le de la vigilance (5).

 

 

 

VI Š LES CRITERES DE DUREE

 

                  Le diagnostic dÕE.S.A. stipule que le trouble doit tre prŽsent au moins deux jours aprs le traumatisme et quÕil ne persiste pas plus dÕun mois. Il est convenu quՈ partir de lˆ, cÕest le diagnostic dÕE.S.P.T. qui convient.

 

                  La durŽe de deux jours aprs le traumatisme appara”t tre dÕune certaine faon arbitraire dans le fait que cette durŽe ne soit pas basŽe sur des dŽcouvertes empiriques concernant des rŽactions normales ou pathologiques au traumatisme aigu.

 

                  Si le diagnostic dÕE.S.A. signifie au dŽcrire dÕune rŽponse aigu‘ qui soit prŽdictive dÕune psychopathologie ˆ long terme, il est nŽcessaire de pouvoir dŽmontrer que les rŽponses qui ne conduisent pas ˆ une rŽmission en moins de deux jours du traumatisme, sont plus prŽdictives de la psychopathologie.

 

                  Des Žtudes prospectives sont nŽcessaires pour indiquer une durŽe de deux, plut™t que trois, quatre, cinq jours, sont les prŽdicateurs les plus solides pour des troubles ultŽrieurs.

 

                  La future formulation de lÕE.S.A. devrait inclure dans les critres de la durŽe des informations basŽes sur des investigations longitudinales de la durŽe des sympt™mes pour permettre dÕaider ˆ diffŽrencier entre une rŽponse adaptative ˆ court terme et une rŽponse clinique prŽdicatrice de symptomatologie sur le long terme.

 

Les critres dÕexclusion :

Sont exclus du diagnostic dÕE.S.A., les traumatismes cr‰niens.

Les effets des blessures de traumatismes cŽrŽbraux peuvent mimer de faon trs proche toute une sŽrie de signes dÕE.S.A..

Un certain nombre de rapports rŽcents soulignent que les patients ayant prŽsentŽ des traumatismes cŽrŽbraux peuvent faire une expŽrience de sympt™mes de stress post-traumatiques (BOHMEN et JOLLES, 1992) (5).

 

 

 

VII Š COMPARAISON DE LÕA.S.D. ET DU P.T.S.D.

 

                  Il est apparent quÕil y a de nombreuses inconsistances entre le critre diagnostique pour lÕE.S.A. et lÕE.S.P.T..

 

                  Les diffŽrences et les similitudes sont mises en Žvidence au niveau du

tableau.

 

                  Mise ˆ part lÕaccentuation des sympt™mes dissociatifs dans lÕE.S.A., le diagnostic dÕE.S.P.T. requiert de faon rigoureuse les sympt™mes diagnostiques dÕintrusion, dՎvitement et de vigilance (5).

 

CRITERES DIAGNOSTIQUES DÕE.S.A. et dÕE.S.P.T.

 

 

 

CRITERES

 

E.S.A.

 

 

E.S.P.T.

STRESSEUR

Les deux :

- Evnement menaant,

- Peur, impuissance ou horreur.

 

Les deux :

- Evnement menaant,

- Peur, impuissance ou horreur.

DISSOCIATION

Au moins trois sympt™mes :

- HŽbŽtude,

- RŽduction de la conscience,

- DŽpersonnalisation,

- DŽrŽalisation,

- AmnŽsie.

 

 

REVIVISCENCE

Au moins un sympt™me :

- Images, pensŽes, dŽtresse rŽcurrentes,

- DŽtresse rŽsultante non obligatoire,

- Caractre intrusif non obligatoire.

Au moins un sympt™me :

- Images, pensŽes, dŽtresse rŽcurrentes,

- DŽtresse rŽsultante obligatoire,

- Caractre intrusif obligatoire.

 

EVITEMENT

- Evitement persistant de :

pensŽes, sentiments ou places.

Au moins trois sympt™mes :

- Evitement de pensŽes, de conversation,

- Evitement de personnes, de places,

- AmnŽsie,

- Diminution de lÕintŽrt,

- Sentiment dՎtrangetŽ des autres,

- Restriction des affects,

- Sentiment dÕavenir bouchŽ.

 

VIGILANCE

Vigilance accrue incluant :

- Agitation, insomnie, irritabilitŽ,

- Hypervigilance et difficultŽs de concentration.

 

Au moins deux sympt™mes :

- Insomnie,

- DifficultŽs de concentration,

- Hypervigilance,

- Sursauts exagŽrŽs.

 

DUREE

- Au moins deux jours et moins dÕun mois aprs le traumatisme.

- Les sympt™mes dissociatifs peuvent tre prŽsents seulement pendant le traumatisme.

 

Au moins un mois aprs le traumatisme.

FONCTION-NEMENT

 

AltŽration du fonctionnement.

AltŽration du fonctionnement.

 

 

 

VIII Š MESURE DES TROUBLES DE STRESS AIGU

 

                  Les chercheurs ont traditionnellement classŽ les rŽponses du stress aigu en employant des mesures qui avaient ŽtŽ dŽveloppŽes pour lÕE.S.P.T.. DÕune manire ou dÕune autre, les mesures sont limitŽes, tout en sachant quÕelles ne sont pas directement indexŽes sur les sympt™mes dissociatifs.

 

                  Beaucoup dՎtudes se sont focalisŽes sur les rŽactions dissociatives en employant la D.E.S..

 

                  Cette Žchelle a ŽtŽ dŽveloppŽ pour mesurer la dissociation pathologique et rŽpertorie les troubles dÕidentitŽ, de perception et de mŽmoire. Elle nÕintgre pas les sympt™mes dÕintrusion, dՎvitement ou dՎveil de lÕE.S.A..

 

                  De ce fait, plusieurs revues ont Žmis des critiques de la D.E.S. et ont suggŽrŽ que la portŽe avec laquelle elle classe la dissociation est influencŽe par la perception quÕont les rŽpondeurs sur le but du questionnaire (SILVA et KIRSH, 1992).

 

                  Deux mesures ont ŽtŽ proposŽes rŽcemment pour mesurer la rŽponse aigu‘ de stress :

         - le S.A.S.R.Q. (Stanford Acute Stress Reaction Questionnaire),

         - la S.C.I.D.-D. (Structured Clinical Interview for D.S.M. IV Dissociative Disorders).

 

                  Le S.A.S.R.Q. est composŽ de 73 items. Il indexe les sympt™mes dissociatifs et anxieux qui peuvent appara”tre pendant et immŽdiatement aprs le traumatisme. Ce questionnaire inclut les sympt™mes diagnostiques de lÕE.S.A., bien quÕil nÕait pas ŽtŽ dŽveloppŽ ˆ la base pour ce diagnostic. De toute faon, il nÕy a actuellement pas de travaux disponibles qui puissent indiquer son utilitŽ diagnostique dÕE.S.A..

 

                  Le S.C.I.D.-D a ŽtŽ proposŽ comme interview structurŽe pour lÕA.S.D., mais en fait, il nÕy a pas de fait qui puisse indiquer son utilitŽ parmi les populations dÕE.S.A..

 

                  Il nÕy a actuellement pas de mesure standardisŽe de la symptomatologie de lÕE.S.A.. Il existe de nombreux entretiens structurŽs et des Žchelles dÕauto-Žvaluation dÕE.S.P.T. (5).

 

 

 

 

                  Nous citerons deux outils dÕauto-Žvaluation :

         - le Q.E.D.P. (Questionnaire sur les ExpŽriences de Dissociation PŽritraumatique),

         - lÕI.E.S.R. (Impact of Event Scale - Revised ou Žchelle dÕimpact de lՎvnement Š RŽvisŽe).

 

                  Le Q.E.D.P. est constituŽ de dix items, cotŽs de 1 ˆ 5.

Il mesure lÕintensitŽ de lՎtat dissociatif au cours dÕun Žvnement traumatique. DÕaprs MARMAR et WEISS (1997), la dissociation est lÕun des meilleurs indicateurs de stress aigu et un excellent prŽdicateur dÕun Žtat de stress post-traumatique.

Ces sympt™mes dissociatifs se caractŽrisent par une rŽduction de lՎtat de conscience, une focalisation ou un Žmoussement Žmotionnel avec un sentiment de dŽtachement par rapport ˆ lÕenvironnement.

Le score est obtenu en effectuant la somme ou la moyenne des dix items dont le Ē seuil clinique Č est 15 (6).

 

                  LÕI.E.S.R. propose vingt-deux items, avec cinq niveaux de cotation, un score de sŽvŽritŽ des sympt™mes post-traumatiques ˆ partir des trois sous scores dont il faut faire la somme ou la moyenne :

                           * intrusion,

                           * Žvitement,

                           * hyperactivitŽ neurovŽgŽtative.

LÕI.E.S.R. ne permet pas de poser un diagnostic, mais les auteurs choisissent actuellement de prendre un score total de 22 comme Žtant lÕindice des sympt™mes significatifs de stress aigu et un score de 36 comme suggŽrant la prŽsence dÕun trouble de stress post-traumatique.

Cet instrument propose une Žvaluation de lÕE.S.A. et de lÕE.S.P.T..

LorsquÕil est choisi pour lÕE.S.A., il est prŽfŽrable de lÕassocier ˆ une mesure de la dissociation pŽritraumatique comme le Q.E.D.P. (6).

 

 

                  LÕinvestigation de lÕE.S.A. repose trs largement sur des entretiens cliniques non structurŽ, et lÕactuelle insuffisance de connaissance et dÕincomprŽhension de lÕE.S.A. peut tre attribuŽe en partie ˆ un manque de mesures standardisŽes qui sont employŽes dans les phases aigu‘s du traumatisme (5).

 

 

 

 

 

IX Š CONCLUSION

 

                  Les nouvelles catŽgories diagnostiques ont souvent des difficultŽs au dŽpart. CÕest seulement quand un diagnostic entre dans la nomenclature psychiatrique que les paramtres standards existent et autorisent les investigations contr™lŽes du trouble.

 

                  Le diagnostic dÕE.S.A. est basŽ de faon appuyŽe sur une perspective thŽorique qui implique une relation causale entre le traumatisme et la dissociation, ainsi que sur la supposition que lÕE.S.A. est prŽdictive dÕune psychopathologie post-traumatique sur le long terme.

 

                  Il y a maintenant un besoin dÕinvestigations contr™lŽes supplŽmentaires pour confirmer ou non cette affirmation et dŽterminer les critres les plus appropriŽs pour le diagnostic dÕE.S.A..

 

                  Il y a de nombreuses critiques que lÕon peut adresser ˆ cette investigation. LÕimportance relative de la dissociation, de lÕintrusion, de lՎvitement et les sympt™mes de vigilance pour prŽdire des troubles ultŽrieurs doit tre clarifiŽe. La durŽe de chaque sympt™me a besoin dՐtre Žtablie empiriquement dans les termes de prŽdire la pathologique ˆ long terme.

 

                  Les problmes inhŽrents aux critres actuels pour le diagnostic dÕE.S.A. peuvent tre attribuŽs en partie aux manques de recherches empiriques qui ont prŽcŽdŽ ce diagnostic.

 

                  Comme la recherche continue dans cette aire clinique, des rŽvisions futures des critres dÕE.S.A. doivent tre dŽterminŽes par des faits empiriques plut™t que par des propositions thŽoriques.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CAS CLINIQUE

PARTIE I

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  En septembre 2002, un accident de la circulation a causŽ de graves blessures ˆ un pre de famille ‰gŽ de 75 ans. La victime, circulant en mobylette, a ŽtŽ heurtŽe violemment par une voiture, ˆ proximitŽ de son domicile.

 

                  Devant la brutalitŽ des faits, la famille de la victime a rŽagi par des Žmotions trs vives o se sont mlŽs des sentiments de colre, de refus de la rŽalitŽ, de protestation, de dŽsarroi et de souffrance intense.

 

                  Cette famille, dÕorigine maghrŽbine, se compose de lՎpouse de la victime et de sept enfants, un garon et six filles, toutes mariŽes, prŽsentŽs par ordre de rang de la fratrie :

 

                  {        - premire, Madame F.M., 45 ans,               nŽe en AlgŽrie,

NON           {        - seconde, Madame F.Z., 42 ans,                }

TEMOINS    {        - troisime, Madame A.K., 41 ans,      }

                  {        - quatrime, Madame Y.B., 39 ans,     }        nŽs en France,

                  {        - cinquime, Madame F.L., 38 ans,     }

TEMOINS    {        - sixime, Madame L.C., 36 ans,                 }

DIRECTS     {        - septime, Monsieur N.M., 33 ans,    }       

                  {        lՎpouse, Madame Z.M., 65 ans,                  }        nŽe en AlgŽrie.

 

DEROULEMENT DES FAITS :

 

                  LՎpouse, le fils N.M. et la fille L.C. ont ŽtŽ tŽmoins directs de lÕaccident.

 

                  Avant lÕarrivŽe du SAMU, le fils, instinctivement, sÕallongea ˆ c™tŽ de son pre inanimŽ, lÕenlaa en lui parlant tendrement, puis courut dans tous les sens ˆ la recherche de secours, alors que la fille et lՎpouse, en furie, agressrent le chauffeur responsable de lÕaccident.

 

                  A lÕarrivŽe des secours, puis des gendarmes, lՎpouse bouscula ces derniers, puis courut dans tous les sens, criant, hurlant, sÕarrachant les cheveux, se roulant et se dŽbattant dans la pelouse quÕelle arrachait.

 

                  LՎquipe du SAMU, aprs une longue prise en charge et de nombreuses tentatives de rŽanimation, dŽcida que la victime devait tre hŽliportŽe dans une unitŽ de neurochirurgie o les spŽcialistes diagnostiqurent un traumatisme cr‰nien gravissime au pronostic des plus rŽservŽs.

 

                  Les autres membres de la famille nÕont pas ŽtŽ tŽmoins de lÕaccident. A lÕannonce de lՎvnement tragique, ils furent trs bouleversŽs et choquŽs.

 

                  La premire fille de la victime, Madame F.M., aprs un long moment dÕhŽbŽtude, sÕeffondra, en larmes puis, dans un Žtat second proche de Ē lՎtat de transe Č, cria sa colre, dŽchirait sa chemise, sÕarracha les cheveux, se lacŽra le visage et le cou en se griffant, avant de perdre connaissance.

 

                  La deuxime fille, Madame F.Z., Žtait inhibŽe, en retrait, exprimant peu dՎmotion.

 

                  La troisime fille, Madame A.K., tŽmoigne de son ressenti :

Ē        A lÕannonce du drame, jÕai senti mon monde basculer, jՎtais au cĻur de la tornade, aspirŽe par la douleur. CՎtait comme un tremblement de terre, comme si la terre sÕouvrait sous mes pieds. JÕavais lÕimpression de basculer dans un gouffre de douleur. Plus rien nÕexistait autour de moi, sauf les proches qui partageaient la mme douleur. Je ne ressentais plus rien É mme mes enfants passaient au second plan. Ce qui se passait me semblait tre un cauchemar, que cela ne pouvait pas tre vrai ni possible. Je refusais de voir la rŽalitŽ. JՎtais compltement dŽconnectŽe et dŽphasŽe. JՎtais confuse, submergŽe par lÕangoisse et le stress. Je nÕavais plus la notion du temps et de lÕespace. Tout Žtait figŽ, rŽtrŽci, restreint autour de la pensŽe de mon pre. Plus rien nÕavait dÕimportance, seul comptait le drame que lÕon vivait Č.

 

                  La quatrime fille, Madame Y.B., resta en Žtat dÕhŽbŽtude pendant plusieurs heures, ne communiqua plus, restant immobile, raide, le regard fixe et hagard, coupŽe du reste du monde.

 

                  La cinquime fille, Madame F.L., ne voulut pas croire ˆ lÕaccident, puis sÕeffondra en larmes et cria sa haine contre celui qui avait causŽ la perte de son pre.

 

 

REACTIONS A LÕANNONCE DU PRONOSTIC VITAL :

 

                  Tard dans la soirŽe, aprs une longue et lourde intervention chirurgicale, les chirurgiens informrent la famille de la gravitŽ des lŽsions cŽrŽbrales et que les chances de survie ne tenaient quՈ un Ē miracle Č.

 

                  Pendant les douze heures dÕattente, lÕangoisse de cette famille atteignit son paroxysme, les pleurs et les lamentations ne cessrent gure.

 

                  A lÕannonce du pronostic vital, la famille dŽnia la gravitŽ de celui-ci. Elle refusa la pensŽe et lÕidŽe mme de la mort, donc de lÕissue fatale quÕelle rŽcusa.

 

                  Chacun conservait lÕespoir, minimisait la gravitŽ du traumatisme cr‰nien, se mettant en tte que ce nՎtait quÕune fausse nouvelle et que le pre sÕen sortirait comme lors du prŽcŽdent accident dont il avait ŽtŽ victime, dans les mmes circonstances et au mme endroit, 20 ans plus t™t.

 

                  La sixime fille, Madame L.C., demeura persuadŽe et convaincue du retour prochain de son pre ˆ la maison et ne cessa de le rŽpŽter.

 

                  La note dÕespoir de la famille fut entretenue par les dires dÕun voisin se prŽsentant comme Ē radiesthŽsiste Č : selon lui, la victime survivrait, mais avec un lourd handicap.

                  La troisime fille, Madame A.K., ajoute ˆ son tŽmoignage citŽ ci-dessus :

Ē LՎnergie que nous mettions ˆ refuser lÕidŽe de la mort, la force de notre amour et la foi en Dieu nous donnaient lÕespoir quÕil y aurait un miracle Č.

A propos des Ē visions Č du radiesthŽsiste, elle dit :

Ē LÕaccumulation du stress, lÕangoisse, lÕattente, la fatigue et la douleur nous ont plongŽ dans un Žtat de faiblesse psychologique o lÕinfluence du radiesthŽsiste a eu un impact sur nous. On Žtait ˆ lÕaffžt de tout ce qui pouvait nous faire croire et nous donner lÕespoir Č.

Elle encha”ne en disant :

Ē Etant de confession musulmane, cÕest la foi qui nous a aidŽ ˆ tenir et ˆ supporter cette tragŽdie. Dans notre dŽsespoir, on avait lÕespoir quÕun Ē miracle Č pouvait se produire avec lÕaide de Dieu. Nous nous sommes accrochŽs ˆ lÕidŽe que, tant quÕil y a un souffle de vie, il y a de lÕespoir. Il fallait donc positiver et ne pas baisser les bras. Nous Žtions dans lÕirrationnel et, pour nous, le jour o nous accepterions lÕidŽe que notre pre devait mourir, il partirait dŽfinitivement Č.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE PREMIER MOIS

 

I Š LE DEUXIEME JOUR

 

                  Les visages Žtaient tendus, p‰les, livides, marquŽs par la fatigue et le manque de sommeil. SÕy ajoutaient lÕanorexie, lÕangoisse et lÕattente interrompue par moment par des dŽcharges Žmotionnelles.

 

                  Toute la famille Žtait en qute et ˆ lÕaffžt de la moindre nouvelle. Elle Žtait irritable (la mre un peu plus), sur le qui-vive, trs sensible ˆ lÕenvironnement, sursautant ˆ chaque sonnerie de tŽlŽphone, ˆ lÕexcs de vitesse des voitures et aux grincements de pneu au freinage et aux sirnes dÕambulances. Elle Žtait en retrait et dŽtachŽe de lÕenvironnement, seul leur drame comptait.

 

                  La seconde fille, Madame F.Z., Žtait toujours inhibŽe, repliŽe sur elle-mme. Elle sÕisola dans la chambre de son pre o elle resta pendant de longues heures. Avec du recul, elle tŽmoigne :

Ē Pendant plusieurs jours, seules la pensŽe et lÕimage de mon pre Žtaient prŽsentes et fixŽes dans mon esprit Č.

 

                  La quatrime fille, Madame Y.B., resta figŽe, stuporeuse, rŽagissant peu aux sollicitations de lÕentourage et de la famille. Elle ne gardera aucun souvenir de cet Žpisode.

 

                  Le fils, Monsieur N.M., dŽambula dans la maison, ne restant pas en place, pleurant en Žvoquant la mŽmoire de son pre.

 

                  Durant plusieurs heures, lՎpouse se lamenta. Elle fut, soit rŽconfortŽe, soit accompagnŽe par les pleurs dÕamis, de proches ou de voisins qui afflurent de toute part.

                  Nous sommes intervenus ˆ ce moment, ˆ la fois comme thŽrapeute et comme conseiller de cette famille subitement confrontŽe ˆ une situation singulire o les capacitŽs dÕadaptation Žtaient dŽpassŽes.

 

                  Notre r™le a ŽtŽ basŽ sur lՎcoute, la disponibilitŽ, lÕinformation et lÕorientation.

 

                  Par notre intervention, une Žbauche de verbalisation a pu sÕamorcer car, partant de ce principe, chacun a pu mettre des mots sur son propre vŽcu de lՎvnement et de lÕaffect qui sÕen dŽcoulait.

 

 

                  A lÕissue de cette intervention, nous avons orientŽ les membres de la famille les plus affectŽs, qui nŽcessitaient une prise en charge approfondie, vers la cellule dÕurgence mŽdico-psychologique (C.U.M.P.) de la rŽgion. Il sÕagissait de lՎpouse de la victime, de Madame Y.B., Madame F.Z. et de Monsieur N.M., lՎpouse refusant de sÕy rendre.

 

 

II Š LE TROISIEME JOUR

 

                  La famille rendit visite ˆ la victime, toujours dans le coma, le facis oedŽmaciŽ le rendant mŽconnaissable.

 

                  Cette visite raviva ˆ nouveau lÕexpŽrience vŽcue le jour du drame. Le stress et lÕangoisse furent paroxystiques.

 

                  A ce propos, la troisime fille, Madame A.K., me fait part de son ressenti :

Ē A notre arrivŽe ˆ lÕh™pital, le bruit dÕhŽlices de lÕhŽlicoptre de secours qui venait dÕatterrir sur la plate-forme a dŽclenchŽ en nous sursauts et forte angoisse. Ce bruit Žtait peru de faon tellement amplifiŽe par notre ou•e que nous avons ŽtŽ obligŽs de nous boucher les oreilles. En mme temps, nous Žprouvions de lÕempathie pour la victime hŽliportŽe et sa famille en dŽtresse. Nous Žtions saisis dÕun sentiment paradoxal entre la h‰te et lÕenvie de voir notre pre, et la peur dՐtre en face de la rŽalitŽ tant redoutŽe Č.

 

                  La cinquime fille, Madame Y.B., ne put sÕapprocher de son pre. Elle Žtait tŽtanisŽe, sidŽrŽe, prise de tremblements. Elle nÕosa ni regarder ni toucher son pre. Elle dira plus tard :

ĒCՎtait un cauchemar que je vivais É JՎtais Žtrangre ˆ mon corps comme si jՎtais spectatrice É Je ne savais plus o jՎtais, ce que je faisaisČ.

 

 

 

 

 

 

 

III Š LES JOURS ET LES SEMAINES SUIVANTES

 

                  La famille Žvita le lieu de lÕaccident, la mre finit par abandonner carrŽment sa maison.

 

                  Les visites, rŽgulires et quasi quotidiennes, durrent de longues heures au chevet de la victime, toujours dans le coma.

 

                  Les multiples tentatives de stimulation, tant physiques (caresses, baisers), que sonores (chansons kabyles et paroles douces) restrent vaines.

 

                  Bien que lՎtat de la victime se dŽgradait, ce que confirmrent les mŽdecins, la famille nÕacceptait toujours pas de croire ˆ lՎvolution fatale, donc ˆ lÕimminence de la mort.

 

                  Chacun Žtait attentif, hypersensible et trs vigilant au moindre mouvement, ˆ la moindre fasciculation ou trŽmulation, de quelquÕamplitude quÕelle soit, dÕun doigt, dÕun orteil, dÕun muscle facial ou dÕun blŽpharospasme. Et lorsque cela se produisait, lÕespoir, ˆ nouveau, ressuscitait.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ELEMENTS SEMIOLOGIQUES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  Les ŽlŽments sŽmŽiologiques dans le cas clinique comportent :

 

1 Š STRESSEUR ET POPULATION A RISQUE

 

                  Il sÕagit dÕune famille confrontŽe ˆ un Žvnement traumatique, lequel a causŽ de graves blessures ˆ la victime.

 

                  Trois membres de cette famille (la mre, le fils Monsieur N.M., la 6e fille, Madame L.C.) Žtaient tŽmoins directs de lÕaccident.

 

                  Les autres membres (5 filles) nՎtaient pas sur le lieu du drame.

 

                  La rŽaction des premiers sÕest traduite par une agitation dŽsordonnŽe et une hyperactivitŽ stŽrile, par un sentiment de peur, dÕhorreur, dÕimpuissance, de colre et de rŽvolte, celle des seconds par un dŽni, un refus de la rŽalitŽ et un sentiment dÕhŽbŽtude.

 

2 Š SYMPTOMES IMMEDIATS (pendant et aprs lՎvnement)

 

                  Au dŽcours de lՎvnement traumatique, et pendant plusieurs heures, certains membres de cette famille ont manifestŽ des rŽactions Žmotionnelles trs fortes o le stress, par son intensitŽ et sa durŽe, a dŽpassŽ leurs capacitŽs adaptatives.

 

                  Nous pouvons dire que ces manifestations traduisent une rŽaction de stress dŽpassŽ quÕon peut dŽcrire par les expressions comportementales suivantes :

 

         - hyperactivitŽ stŽrile et incoercible (cf. les tŽmoins directs) :

                  * agitation dŽsordonnŽes et stŽrile,

                  * hŽtŽro-agressivitŽ,

                  * perte de contr™le des mouvements,

 

         - comportement automatique avec gestes stŽrŽotypŽs rŽpŽtitifs ˆ caractre Ē incongru Č (cf. la mre, la premire fille, Madame F.M. et la 6e fille, Madame L.C.) :

                  * dŽbattement,

                  * automutilation (autolacŽration par griffures, arrachage de cheveux),

                  * dŽchirure des vtements,

                  * lamentations incessantes,

                  * cris et hurlements

 

         - ŽlŽments dissociatifs :

                  * rŽaction de sidŽration, dÕhŽbŽtude, de stupeur et dÕinhibition motrice, observŽe ˆ des degrŽs dÕintensitŽ variable, notamment chez les proches non tŽmoins des faits. Chez la 4e fille, Madame Y.B., cette rŽaction Žtait trs marquŽe de par son intensitŽ et sa durŽe prolongŽe (plusieurs jours),

                  * rŽduction de la conscience, rapportŽe par la troisime fille, Madame A.K.,

                  * dŽpersonnalisation rapportŽe par la quatrime fille, Madame Y.B.,

                  * dŽrŽalisation rapportŽe par la quatrime fille, Madame Y.B. et la troisime fille, Madame A.K.,

                  * amnŽsie lacunaire, chez la quatrime fille, Madame Y.B.

 

         - manifestations anxieuses et activation neurovŽgŽtative :

                  * anxiŽtŽ majeure,

                  * tachycardie, oppression thoracique,

                  * p‰leur,

                  * sudation,

                  * tremblements, trŽmulations,

                  * fonctions biologiques perturbŽes, inappŽtence et difficultŽs dÕendormissement.

 

 

3 Š SYMPTOMES POST-IMMEDIATS

 

                  Ce sont ceux qui surviennent dans les jours qui suivent lՎvnement traumatique :

 

         - Nous relevons :

                  * la persistance de la symptomatologie dissociative chez Madame Y.B. et Madame F.Z., puis rŽsolution progressive les jours suivants,

                  * rŽsolution du trouble du comportement dŽcrit dans la premire phase par lÕhyperactivitŽ stŽrile, et comportement avec gestes stŽrŽotypŽs,

                  * sympt™mes de reviviscence marquŽs par des souvenirs, pensŽes et images rŽcurrentes de la victime avec dŽtresse rŽsultante faite de dŽcharges tensionnelles avec pleurs, lamentation et dŽsir intense de la prŽsente de lՐtre cher avec sentiment de solitude. Cette symptomatologie a durŽ plusieurs semaines, voire pendant des mois (chez les 4e, 6e, 7e filles et la mre),

 

 

         - Nous observons aussi :

                  * des sympt™mes dՎvitement : ils sont portŽs essentiellement sur le lieu de lieu de lÕaccident. La mre quitte sa maison.

On observe une rŽduction de lÕintŽrt et un retrait affectif unanime et un sentiment de dŽtachement dÕautrui,

                  * sympt™mes de vigilance accrue marquŽs par :

                           ” des difficultŽs dÕendormissement et sommeil interrompus pendant plusieurs jours, observŽes chez presque la totalitŽ des membres de la famille ; la mre, la 3e fille, Madame A.K., la 4e fille, Madame Y.B., la 6e fille, Madame L.C., ont nŽcessitŽ la prescription dÕun traitement hypnotique et anxiolytique,

                           ” une irritabilitŽ ou accs de colre chez la majoritŽ des proches, avec excs chez lՎpouse de la victime,

                           ” des sympt™mes dÕhypervigilance portant sur le moindre mouvement de la victime, dՎtat de Ē qui vive Č, dÕhypersensibilitŽ et de rŽactions de sursaut rapportŽs de faon presque unanime, mais exacerbŽs chez Madame Y.B., Madame L.C. et leur mre. Les rŽactions de sursaut Žtaient portŽes sur les stimuli sonores (sonnerie de tŽlŽphone, vitesse excessive, grincement de pneus de voiture, bruit dÕhŽlices dÕhŽlicoptre, sirnes dÕambulance).

 

 

Dans le DSM IV, le diagnostic dÕE.S.A. repose sur cinq critres :

 

         - critre A : Žvnement traumatique et souffrance qui en dŽcoule,

 

         - critre B : au moins trois sympt™mes dissociatifs aigus,

 

         - critre C : avoir vŽcu au moins un sympt™me de reviviscence,

 

         - critre D : un Žvitement persistant,

 

         - critre E : un Žtat dÕalerte permanent,

 

et sur le fait que la perturbation dure un minimum de deux jours et un maximum de quatre semaines.

 

 

PENDANT LES PREMIERES SEMAINES :

 

1 Š CRITERE A :

 

         LՎvnement traumatique Žtait vŽcu avec horreur, impuissance et peur intense.

A ce propos, certains auteurs font de lÕeffroi un signe presque pathognomonique du traumatisme et considrent que le traumatisme peut sÕaccompagner aussi bien dÕun stress adaptŽ que dŽpassŽ (7).

 

2 Š CRITERE B :

 

         La symptomatologie dissociative telle quÕelle est dŽfinie dans le critre B est retrouvŽe chez la totalitŽ des membres de la famille (voir tableau I).

HOROWITCH met lÕaccent sur les rŽactions dissociatives dans le diagnostic dÕE.S.A. et la portŽe avec laquelle elles prŽdisent la survenue dÕun E.S.P.T..

DÕautres auteurs (8), ˆ partir de multiples Žtudes cliniques, sont arrivŽs ˆ la mme conclusion.

Nous remarquons que chez la quatrime fille, Madame Y.B., la sixime, Madame L.C., et chez leur mre, Madame Z.M., la dissociation Žtait vŽcue intensŽment Š et de faon prolongŽe chez Madame Y.B. -, avec des scores ŽlevŽs respectifs de 5, 4 et 4 (voir tableau I).

Certains auteurs soulignent que la persistance de la symptomatologie dissociative aigu‘ prŽdit la survenue de lÕE.S.P.T.. (KOOPERMAN et All).

Conclusion :

A partir de la confrontation des donnŽes de la littŽrature, nous pouvons avancer lÕhypothse suivante : la symptomatologie dissociative retrouvŽe chez lÕensemble de la famille peut prŽdire la survenue ultŽrieure dÕun E.S.P.T., mais avec une forte probabilitŽ chez Madame Y.B., Madame L.C. et chez leur mre, Madame Z.M..

 

3 Š CRITERE C :

 

                  Les trois quarts de la famille rŽpondent au critre C qui dŽfinit la reviviscence (voir tableau II).

Il est mentionnŽ dans le DSM IV, pour le diagnostic dÕE.S.A., que la dŽtresse rŽsultant de la reviviscence nÕest pas requise, alors quÕelle lÕest dans lÕE.S.P.T..

La reviviscence a ŽtŽ vŽcu ˆ des degrŽs dÕintensitŽ variable, elle Žtait plus accentuŽe et accompagnŽe de dŽtresse chez Madame Y.B., Madame L.C. et chez leur mre, Madame Z.M., avec un score respectif de 3, 5 et 4.

 

Beaucoup dÕauteurs soulignent que la reviviscence des sympt™mes dans la phase traumatique immŽdiate peut tre prŽdictive dÕun E.S.P.T..

Pour certains (9), ces sympt™mes sont quasiment pathognomoniques de lÕE.S.P.T.. Pour dÕautres, lÕextension des intrusions initiales sont prŽdicateurs dÕun futur E.S.P.T., dŽpend en partie de la prŽsence de lՎvitement durant la phase aigu‘.

Conclusion :

A partir de ces sympt™mes de reviviscence, nous pouvons poser comme hypothse que les trois quarts des membres de cette famille peuvent prŽdire ˆ la survenue ultŽrieure dÕun P.T.S.D.. Tel diagnostic est plut™t favorable pour Madame Y.B., Madame L.C. et leur mre, Madame Z.M..

 

 

4 Š CRITERE D :

 

         Toute la famille rŽpond au critre D (voir tableau IV) qui dŽfinit lՎvitement. Celui-ci porte surtout sur le lieu de lÕaccident puis lÕabandon de la maison par la mre.

Pour certains auteurs, lՎvitement exercŽ de manire excessive peut empcher les traitements Žmotionnels des souvenirs traumatiques. De ce fait, lՎvitement est dŽcrit comme un des premiers prŽdicateur de lÕE.S.P.T. chronique.

Conclusion :

Hypothse : lՎvitement du lieu de lÕaccident et de la maison par la famille peut prŽdire ˆ la survenue ultŽrieure dÕun E.S.P.T..

 

5 Š CRITERE E :

 

         Il dŽfinit la prŽsence de sympt™mes anxieux persistants ou bien des manifestations neurovŽgŽtatives (voir tableau III).

Ces deux groupes de sympt™mes sont retrouvŽs de faon unanime chez cette famille.

Ces sympt™mes de vigilance sont retrouvŽs avec un score trs ŽlevŽ (5/5) chez Madame Y.B., Madame L.C. et leur mre, Madame Z.M..

Le trouble du sommeil, prolongŽ (pendant plusieurs jours), est prŽsent chez les trois quarts de la famille (la premire fille, Madame F.M., la deuxime fille, Madame F.Z., la troisime fille, Madame A.K., la quatrime fille, Madame Y.B., la sixime fille, Madame L.C., et la mre, Madame Z.M.).

 

WEISAETH a prouvŽ que la persistance de lÕanxiŽtŽ et des troubles du sommeil deux semaines aprs lՎvnement traumatique Žtait prŽdictive dÕun E.S.P.T..

SHALER prŽdit lÕE.S.P.T. ˆ partir de lÕimportance potentielle des sympt™mes de vigilance initiaux.

 

Conclusion :

 

 

Nous pouvons avancer lÕhypothse que les trois quarts de cette famille peut prŽdire ˆ la survenue dÕun E.S.P.T., notamment chez Madame Y.B., Madame L.C. et leur mre, Madame Z.M., o les scores sont importants.

 

6 Š Nous rappelons que le DSM IV stipule que dans lÕE.S.A., la perturbation dure un minimum de deux jours et un maximum de quatre semaines.

LÕensemble de la famille rŽpond au paramtre temporel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAUX ET INTERPRETATIONS

HISTOGRAMMES ET CAMEMBERTS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU I

 

 

 

FAMILLE

 

SYMPTOMES DE

DISSOCIATION

 

 

F.M.

1re

 

 

 

F.Z.

2e

 

 

A.K.

3e

 

 

Y.B.

4e

 

 

F.L.

5e

 

 

L.C.

6e

 

 

N.M.

7e

 

 

MERE

 

STUPEUR

TORPEUR

DETACHEMENT

 

 

+

 

++

 

+

 

+++

 

+

 

(-)

 

+

 

(-)

 

REDUCTION DE LA CONSCIENCE

 

 

+

 

+

 

+

 

 

+++

 

+

 

+

 

++

 

+

 

DEPERSONNALISATION

 

(-)

(-)

(-)

+++

(-)

++

(-)

++

 

DEREALISATION

 

(-)

+

+

+++

(-)

+++

+

+++

 

AMNESIE

 

(-)

(-)

(-)

+++

(-)

+

(-)

+++

 

SCORES DES SYMPTOMES

 

2

 

3

 

3

 

5

 

2

 

4

 

3

 

4

SCORES INTENSITE DISSOCIATION

MODERE

(1)

IMPORTANT

(2)

MODERE

(1)

TRES IMPORTANT

(3)

MODERE

(1)

TRES IMPORTANT

(3)

IMPORTANT

(2)

TRES IMPORTANT

(3)

 

(-)        NUL (0)

+         MODERE (1)

++       IMPORTANT (2)

+++     TRES IMPORTANT (3)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU II

 

 

 

FAMILLE

 

 

REVIVISCENCE

 

 

F.M.

1re

 

 

 

F.Z.

2e

 

 

A.K.

3e

 

 

Y.B.

4e

 

 

F.L.

5e

 

 

L.C.

6e

 

 

N.M.

7e

 

 

MERE

SOUVENIR REPETITIF IMAGE-PENSEE

 

-

+

+

++

-

 

+++

+++

+++

REVE REPETITIF

 

-

-

 

-

 

-

 

-

++

-

 

-

 

SENTIMENT DE REVIVRE LÕEVENEMENT PAR ILLUSION, HALLUCINA-TION, FLASH-BACK

 

 

-

 

-

 

-

 

-

 

-

 

+++

 

-

 

++

SENTIMENT DE REVIVRE LÕEXPERIENCE

 

-

-

+

+++

-

+++

+++

+++

SOUFFRANCE LORS DE LÕEXPOSITION A CE QUI PEUT RAPPELER LÕEVENEMENT

 

 

-

 

-

 

-

 

++

 

-

 

+++

 

-

 

+++

 

SCORES DES SYMPTOMES

 

 

0

 

1

 

2

 

3

 

0

 

5

 

2

 

4

SCORES INTENSITE REVIVISCENCE

NUL

(0)

MODERE

(1)

MODERE

(1)

TRES IMPORTANT

(3)

NUL

(0)

TRES IMPORTANT

(3)

TRES IMPORTANT

(3)

TRES IMPORTANT

(3)

(-)        NUL (0)

+          MODERE (1)

++        IMPORTANT (2)

+++      TRES IMPORTANT (3)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU III

 

 

 

FAMILLE

 

VIGILANCE ACCRUE + ACTIVITE NEURO

VEGETATIVE

 

 

F.M.

1re

 

 

 

F.Z.

2e

 

 

A.K.

3e

 

 

Y.B.

4e

 

 

F.L.

5e

 

 

L.C.

6e

 

 

N.M.

7e

 

 

MERE

 

DIFFICULTE DÕENDORMIS-SEMENT OU SOMMEIL IN-TERROMPU

 

 

+

 

+

 

+

 

+

 

-

 

+

 

-

 

++

 

IRRITABILITE OU ACCES DE COLERE

 

 

++

 

-

 

+

 

+

 

+

 

+++

 

-

 

+++

 

DIFFICULTE DE CONCENTRATION

 

 

-

 

+

 

-

 

+++

 

-

 

+++

 

++

 

+++

 

HYPERVIGILANCE

 

 

-

 

+

 

 

+

 

++

 

-

 

 

+++

 

-

 

+++

 

REACTION DE SURSAUT EXAGEREE

 

 

-

 

++

 

++

 

+++

 

-

 

+++

 

-

 

+++

 

SCORES DES SYMPTOMES

 

 

2

 

4

 

4

 

5

 

1

 

5

 

1

 

5

SCORES INTENSITE VIGILANCE ACCRUE

IMPORTANT

(2)

IMPORTANT

(2)

IMPORTANT

(2)

TRES IMPORTANT

(3)

MODERE

(1)

TRES IMPORTANT

(3)

MODERE

(1)

TRES IMPOR

TANT

(3)

+          MODERE (1)

++        IMPORTANT (2)

+++      TRES IMPORTANT (3)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU IV

 

 

FAMILLE

 

 

EVITEMENT

 

 

F.M.

1re

 

 

 

F.Z.

2e

 

 

A.K.

3e

 

 

Y.B.

4e

 

 

F.L.

5e

 

 

L.C.

6e

 

 

N.M.

7e

 

 

MERE

 

EVITEMENT DE

* PENSEE

* SENTIMENT

* CONVERSATION

37,5 %

 

 

-

 

 

-

 

 

-

 

 

-

 

 

-

 

 

+

 

 

+

 

 

+

 

EVITEMENT DÕACTIVITE OU DE SITUATION

50 %

 

-

 

-

 

-

 

+

 

-

 

++

 

++

 

+++

 

SCORES DES SYMPTOMES

 

 

0

 

0

 

0

 

1

 

0

 

2

 

2

 

2

SCORES INTENSITE EVITEMENT

 

 

NUL

(0)

 

NUL

(0)

 

NUL

(0)

 

MODERE

(1)

 

NUL

(0)

 

IMPORTANT

(2)

 

IMPORTANT

(2)

 

TRES IMPORTANT

(3)

 

            NUL (0)

+         MODERE (1)

++       IMPORTANT (2)

+++     TRES IMPORTANT (3)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU V COMPARATIF DES FREQUENCES DES SYMPTOMES DÕE.S.A.

OBSERVES DANS LE CAS CLINIQUE

COMPAREES A CELLES DECRITES DANS LA LITTERATURE (5)

 

 

 

 

 

 

 

 

CAS CLINIQUE

 

TEMOINS DÕEXECUTION

 

SURVIVANTS DÕACCIDENT DE VOITURE

 

 

SURVIVANTS DE CRASH DÕAVION

 

SURVIVANTS DE TREMBLE-MENTS DE TERRE

 

SURVIVANTS DÕEMBUSCADE

 

DISSOCIATION

DEPERSONNALISATION

 

 

 

37,5 %

 

 

40 %

(FREINKEL et Al,

1994)

 

 

31 %

(NOYES et Al,

1997)

 

 

 

54 %

(SLOAN, 1988)

 

 

25 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

 

 

DEREALISATION

 

 

75 %

 

53 %

(FREINKEL/

SPIEGEL et

KOOPMANN, 1994)

 

 

30 %

(NOYES/KLETTI, 1977)

 

30 %

(NOYES/KLETTI, 1977)

 

40 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

AMNESIE DISSOCIATIVE

 

 

37,5 %

 

 

 

 

29 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

57 %

(FEINSTEIN, 1989)

 

REVIVISCENCE PENSEES INTRUSIVES (E.S.P.T.)

 

 

 

75 %

 

 

 

71 %

(SLOAN, 1988)

 

 

39 %

 

 

EVITEMENT PERSISTANT (SITUATION)

 

 

50 %

 

 

50 %

(BRYANT et HARVAY, 1996)

 

 

30 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

SYMPTOMES DÕHYPERVIGI-

LANCE

INSOMNIE

 

 

 

75 %

 

 

 

 

68 %

(SLOAN, 1988)

 

 

44 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

50 %

(FEINSTEIN, 1989)

 

DIFFICULTES DE CONCENTRATION

 

 

62,5 %

 

 

 

 

71 %

(CARDENA/

SPIEGEL, 1993)

 

 

 

IRRITABILITE

 

 

75 %

 

 

 

71 %

(SLOAN, 1988)

 

 

 

 

SURSAUTS EXAGERES

 

 

62,5 %

 

 

 

70 %

(SLOAN, 1988)

 

36 %

(SLOAN, 1988)

 

93 %

(FEINSTEIN, 1989)

 

 

 

 

 

 

 

TABLEAU VI

 

 

 

SCORES INTENSITE

(des sympt™mes)

 

 

SCORES SYMPTOMES

 

FAMILLE

 

DISSO

CIATION

 

 

REVIVIS

CENCE

 

VIGILAN

CE

 

EVITE

MENT

 

TOTAL

 

 

DISSO

CIATION

 

 

REVIVISCEN

CE

 

VIGI

LANCE

 

EVITE

MENT

 

TOTAL

 

1re

F.M.

 

1

 

0

 

2

 

0

 

3

 

 

2

 

0

 

2

 

0

 

4

 

2e

F.Z.

 

2

 

1

 

2

 

0

 

5

 

 

3

 

1

 

4

 

0

 

8

 

3e

A.K.

 

1

 

1

 

2

 

0

 

4

 

 

3

 

2

 

4

 

0

 

9

 

4e

Y.B.

 

3

 

3

 

3

 

1

 

10

 

 

 

5

 

3

 

5

 

1

 

14

 

5e

F.L.

 

1

 

0

 

1

 

0

 

2

 

 

2

 

0

 

1

 

0

 

3

 

6e

L.C.

 

3

 

3

 

3

 

2

 

11

 

 

4

 

5

 

5

 

2

 

16

7e

N.M.

 

2

 

3

 

2

 

2

 

9

 

 

3

 

2

 

1

 

2

 

8

 

MERE

 

3

 

3

 

3

 

3

 

12

 

 

4

 

4

 

5

 

2

 

15

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 


 

 


 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


INTERPRETATION DES TABLEAUX

 

                  LÕenqute sŽmiologique a permis de dresser des tableaux par critre diagnostique dÕE.S.A., ˆ savoir :

 

         - Dissociation (tableau I),

         - Reviviscence (tableau II),

         - Vigilance accrue (tableau III),

         - Evitement (tableauV).

 

                  Les sympt™mes de chaque critre Žtaient chiffrŽs en fonction de deux paramtres (ce qui appara”t dans les quatre tableaux), ˆ savoir :

 

         - Score des sympt™mes,

         - Score de lÕintensitŽ des sympt™mes,

 

reprŽsentŽs par :

         nul (0)

         modŽrŽ (+ ou 1)

         important (++ ou 2)

         trs important (+++ ou 3).

 

                  A lÕaide de ces tableaux, jÕai Žtabli des statistiques en pourcentage de chaque sympt™me, cela mÕa permis dÕune part de rŽaliser des histrogrammes par grands thmes : dissociation, vigilance, reviviscence, Žvitement et, dÕautre part, de la comparer aux frŽquences dŽcrites dans la littŽrature (tableau V).

 

                  Ensuite, jÕai repris les paramtres scores des sympt™mes et scores dÕintensitŽ des huit personnes intŽressŽs dans le cas clinique pour obtenir le tableau VI.

 

                  Les histogrammes ainsi formalisŽs nous permettent de visualiser et de mesurer le degrŽ dÕintensitŽ des sympt™mes et leurs scores.

 

                  De mme, le dŽtail par critres est repris avec les chiffres ainsi de visualiser encore plus finement lÕapparition de certains sympt™mes et leur degrŽ dÕintensitŽ chez toutes les personnes.

 

                  Puis, par rapport aux scores des sympt™mes, mme dŽmarche que pour lÕintensitŽ.

 

                  Enfin, la rŽalisation dÕune courbe mesurant les totaux des scores (intensitŽ-sympt™mes) obtenue pour chaque personne, nous permet de noter les scores importants rŽalisŽs par :

 

         - Madame Y.B. avec        un score dÕintensitŽ ˆ 10

                                            un score sympt™me ˆ 14,

 

         - Madame L.C. avec        un score dÕintensitŽ ˆ 16

                                            un score sympt™me ˆ 11,

 

         - Madame Z.M. avec       un score dÕintensitŽ ˆ 15

                                            un score sympt™me ˆ 12.

 

                  Les trois pics de la courbe peuvent tre interprŽtŽs par lÕhypothse suivante :

 

Plus les sympt™mes aigus sont importants et vŽcus intensŽment, plus ils prŽdisent au long terme au dŽveloppement ultŽrieur dÕun Žtat de stress post-traumatique (E.S.P.T.).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMPORTEMENT SELON LES PERSONNES ET SELON LES CULTURES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  Les comportements diffrent selon les personnes et selon le contexte culturel.

 

 

1 Š Comportement selon les personnes

 

                  Les rŽactions individuelles, immŽdiates ou diffŽrŽes, chez les victimes directes ou indirectes dÕune catastrophe, peuvent prŽsenter tout lՎventail de la symptomatologie psychotraumatique, allant des rŽactions Žmotionnelles brves ˆ des troubles beaucoup plus durables : E.S.P.T. et/ou comorbiditŽ dŽpressive, anxiophobique ou hypocondriaque.

 

                  Le niveau de stress traumatique dŽpendra dÕun jeu de variables, les capacitŽs individuelles dÕadaptation, le comportement durant lՎvnement traumatique et le degrŽ dÕanticipation.

 

                  Il existe une variation inter-individuelle considŽrable, pour la vulnŽrabilitŽ, ˆ ce qui est traumatisant ou non (15).

 

                  Les rŽactions de lÕindividu sont influencŽes par un ensemble complexe de facteurs biologiques, sociaux, tempŽramentaux et expŽrientiels qui ont des effets positifs (rŽsilience) ou nŽgatifs (15).

 

                  La rŽsilience est la capacitŽ de certains ˆ Ē rebondir Č et ˆ faire face aux effets dŽlŽtres dÕun environnement hostile et agressif.

 

                  La plupart des auteurs sont en accord avec le modle selon lequel les traits de personnalitŽ inter-agissent avec les comportements, qui sont eux-mmes dŽfinis par des actes observables et des pensŽes ou des sentiments non observables.

 

                  L.A. CLARCK et All et D. WATSON et All, ont proposŽ une structure hiŽrarchique pour prŽsenter des traits de personnalitŽ principaux : neurotisisme/nŽvrotisme ou ŽmotionalitŽ nŽgative, extraversion ou ŽmotionalitŽ positive.

 

                  Les termes de nŽvrotisme, affectivitŽ nŽgative et ŽmotionalitŽ nŽgative ont ŽtŽ utilisŽs pour dŽcrire un large aperu des dimensions de personnalitŽ proposŽes comme Žventuel facteur de risque pour lÕE.S.P.T., principalement parce que cette dimension reflte la sensibilitŽ aux stimuli nŽgatifs (15).

 

                  SchŽmatiquement, on peut dire que le nŽvrotisme Ē dŽnote un manque gŽnŽral dÕintŽgration de la personnalitŽ, dÕadaptabilitŽ et dÕeffort gŽnŽral Č.

 

                  Il sÕagit de personnalitŽs qui tolrent mal les agressions et dont la conduite a tendance ˆ se dŽsorganiser dans les situations de conflits ou de frustration, les traits principaux Žtant lÕanxiŽtŽ flottante, lÕhostilitŽ, le pessimisme et lÕalexithymie (Žtat dÕinhibition irrationnelle sÕaccompagnant de difficultŽs ˆ exprimer des sentiments).

 

                  LÕextraversion regroupe des traits de personnalitŽ qui rappellent en partie la personnalitŽ histrionique. LÕextraverti est typiquement un sujet sociable, impulsif et optimiste.

 

                  LÕintroversion regroupe plut™t des traits Ē dysthymiques Č. LÕintroverti est typiquement un individu qui prŽsente des caractŽristiques psychologiques opposŽes ˆ celles de lÕextraverti, facilement anxieux, apathique, voire dŽpressif (16).

 

                  Nous avons remarquŽ que les rŽactions individuelles diffrent dÕune personne ˆ lÕautre dans cette famille :

 

         - les personnes aux traits de personnalitŽ plut™t extravertis (ŽmotionalitŽ positive), c'est-ˆ-dire lՎpouse de la victime, Madame Z.M., deux de ses filles, Madame F.M. et Madame L.C..

Leurs rŽactions ˆ lՎvnement tragique se sont manifestŽes par un comportement totalement dŽsorganisŽ avec :

                  * cris, hurlements, dŽcharges Žmotionnelles vives et lamentations excessives,

                  * agitation, hyperactivitŽ dŽsordonnŽe incontr™lable,

                  * gestes stŽrŽotypŽs avec dŽbattement et automutilation,

                  * hŽtŽro-agressivitŽ,

                  * Žtat de transe.

         - les personnes aux traits plut™t introvertis (ŽmotionalitŽ nŽgative, c'est-ˆ-dire Madame Y.B. et Madame F.Z., qui ont rŽagi par :

                  * une attitude de prostration, inhibition, torpeur et stupeur,

                  * une attitude de repli et dÕisolement,

                  * une alexithymie.

 

 

 

 

 

 

2 - Comportements selon les cultures

 

                  Les peuples plus Ē simples Č, plus communautaires, sont plus naturels, plus spontanŽs. Ils expriment plus directement et plus profondŽment leurs Žmotions dans le cadre de conduites collectives dŽterminŽes et arrivent ainsi ˆ libŽrer plus facilement leur fardeau(18).

 

                  Le comportement dŽsordonnŽ, stŽrŽotypŽ et incongru de lՎpouse et de la 1re fille de la victime, Madame F.M., ne sont que le reflet dÕun schŽma traditionnel appris.

 

                  Il faut souligner que cette famille dÕorigine algŽrienne est arrivŽe en France en 1960. Madame F.M. avait alors 3 ans et a gardŽ des liens charnels avec son pays dÕorigine et sa grand-mre chez qui elle retournait chaque annŽe.

 

                  En AlgŽrie, le corps, lÕimportance gestuelle jouent un r™le primordial dans la communication.

 

                  Le corps est richement investi symboliquement.

 

                  Les comportements auto-agressifs observŽs dans les moments tragiques ou manifestations de deuil dans la communautŽ maghrŽbine sont prisŽs de la culture ambiante dÕorigine.

 

                  Ces manifestations se traduisent initialement par un mŽlange dÕabattement, de prostration, de recueillement, puis sont accompagnŽes par des dŽcharges Žmotionnelles faites de cris, de pleurs, de sanglots, de gŽmissements et de lamentations fŽminines collectives (parfois assistŽs de pleureuses) et ritualisŽes avec griffures et auto lacŽrations du visage.

                  Ces manifestations prennent parfois un aspect de Ē transe hystŽrique Č.

 

                  Ces pratiques, par leur aspect collectif et hyper-expressif, apparaissent comme un catharsis (*), un exutoire Žmotionnel (17).

(*) Catharsis : mot grec empruntŽ ˆ Aristote qui lui donnait le sens de purgation des passions. EmployŽ pour dŽsigner les psychothŽrapies qui provoquent la disparition des sympt™mes en dŽclenchant lÕextŽriorisation verbale et Žmotionnelle des traumatismes refoulŽs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CAS CLINIQUE

PARTIE II

 

CONSEQUENCES A MOYEN ET A LONG TERME

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES MOIS SUIVANTS

 

 

CONSEQUENCES A MOYEN ET A LONG TERME

 

                  La grande question est celle des consŽquences ˆ moyen et ˆ long terme liŽes ˆ lՎvnement traumatique.

 

                  Cette famille reprŽsente une mini population dՎtude que je vais essayer de dŽcrire de faon progressive sur douze mois.

 

 

1 Š Au dŽbut du deuxime mois

 

                  Madame L.C. me tŽmoigna de ses troubles anxieux que nous qualifierons dÕattaque de panique, troubles dŽclenchŽs, soit spontanŽment, soit au cours de conversation relatant le rŽcit de lÕaccident. Par moments, elle Žtait submergŽe et envahie par des sensations de malaise avec sensations de vertige, impression dՎvanouissement : Ē Je me sentais partir Č, p‰leur, nausŽes et tachycardie, impression dՎtouffement avec sensations de Ē souffle coupŽ Č, peur de perdre le contr™le de soi et dŽpersonnalisation : Ē Une partie de moi ne mÕappartenait plus, elle devenait Žtrangre Č.

 

2 Š Au dŽbut du troisime mois

 

                  Madame L.C. me rapporta un ŽlŽment supplŽmentaire important quÕelle qualifiait de visions : Ē En me rendant ˆ mon travail, je voyais des scnes dÕaccident sur lÕautoroute. Heureusement, je ne roulais pas vite et la circulation Žtait fluide. JÕai gardŽ mon sang-froid. JÕai eu le Ē rŽflexe Č de mÕarrter sur la bande dÕarrt dÕurgence Č.

 

                  Madame Y.B. me dŽcrivit des troubles portant sur ses difficultŽs de concentration et dÕattention : Ē Lorsque je roulais en voiture, il mÕarrivait de me tromper de route et de me tromper É Par moments, jÕavais des trous. Une fois, jÕai carrŽment oublier de rŽcupŽrer ma fille ˆ lՎcole maternelle Č.

 

                  LՎpouse de la victime, Madame Z.M., Žvitait de se rendre seule dans sa maison. Elle Žtait trs irritable avec des accs de colre. Elle me rapporta des plaintes somatiques multiples : Ē Je suis fatiguŽe, jÕai des douleurs partout Č.

 

 

                  Monsieur N.M. resta en retrait, Žvitant la famille, prŽfŽrant rendre parfois visite ˆ son pre en solitaire.

                  Madame A.K. fit un long tŽmoignage que je rŽsume : une tumeur du sein avait ŽtŽ diagnostiquŽe un mois avant le drame, nŽcessitant une opŽration rapidement. Le drame retarda et diffŽra lÕintervention chirurgicale. Les radiographies de contr™le montrrent que la tumeur avait doublŽ de volume. Aprs exŽrse de celle-ci, lÕexamen anatomopathologique ne dŽcela aucune malignitŽ. Une semaine aprs, elle me rappela que lÕaccident de son pre Žtait survenu le jour mme de son anniversaire. Elle se sentait coupable dՐtre nŽe ˆ la date o la vie de son pre sՎtait Žteinte. Elle dit, en pleurs : Ē DŽsormais, ce ne sera plus un jour sous le signe de la vie Č. Puis, aprs un long silence, elle ajouta : Ē De toute faon, ma naissance Žtait dŽjˆ problŽmatique ; je nՎtais pas dŽsirŽe par ma mre. Aprs la naissance de mes deux sĻurs, elle aurait prŽfŽrŽ enfanter dÕun garon. Sa dŽception lÕa plongŽe dans une longue dŽpression. Face au drame, jՎtais face ˆ la mort, au danger et ˆ lÕabandon. Je me suis sentie coupable et angoissŽe de vivre Č.

 

                  Nos interventions, par lՎcoute, le soutien psychologique, la prise en charge dՎtats pathologiques (insomnie, anxiŽtŽ, dŽpression et somatisation), et par lÕaccompagnement gr‰ce auquel lÕidŽe de la mort a pu tre amorcŽe puis acceptŽe, ont permis au travail de prŽ-deuil de commencer.

 

                  Pendant cette pŽriode, lՎtat de santŽ de la victime sÕest encore dŽtŽriorŽ, avec lÕapparition de complications secondaires.

 

                  Le dŽcs est survenu au bout de quatre mois et demi de coma vŽgŽtatif.

 

                  La perte de lՐtre cher a ŽtŽ acceptŽe de faon moins tragique et moins dramatique, les pleurs et les lamentations Žtaient exprimŽs plus simplement.

 

                  A partir de ce moment, le travail de deuil proprement dit a pu dŽbuter.

 

3 Š Cinq mois aprs lՎvnement traumatique (15 jours aprs le dŽcs)

 

                  Madame Z.M., lՎpouse du dŽfunt, a regagnŽ dŽfinitivement sa maison.

Elle me fit part de son ressenti concernant le dŽcs de son mari, des funŽrailles et de lÕinhumation de celui-ci en AlgŽrie.

Elle me parla de son vŽcu personnel de la mort en France et celui de la communautŽ maghrŽbine en gŽnŽral.

 

Elle prŽsentait des troubles de la marche, se plaignait de douleurs et de paresthŽsies plantaires droites. Les radiographies demandaient par les spŽcialistes nÕont pas dŽcelŽ de lŽsions. Un traitement banal ˆ base dÕantalgiques lui fut prescrit.

 

                  Madame Y.B. me tŽmoigne de sa tristesse, de son retrait, de son isolement, de son manque dÕintŽrt et dÕaffects, et dÕun sentiment de vide intŽrieur. Elle se plaignait de fatigue, dÕinsomnie et dÕanorexie avec amaigrissement important.

Elle dira aussi : Ē LÕimage de mon pre ne me quitte plus. Je suis irritable, je ne supporte plus le bruit, la tŽlŽ É et mes problmes de concentration sont toujours lˆ.

Elle me signala des troubles dÕordre gynŽcologique avec mŽtrorragies et douleurs pelviennes, survenus trois semaines aprs le dŽcs de son pre. Une consultation spŽcialisŽe et une Žchographie abdomino-pelvienne Žtaient sans particularitŽ.

 

                  Madame A.K. a prŽsentŽ Žgalement un Žpisode marquŽ par une tristesse, une souffrance ˆ lՎvocation de son pre, et un languissement avec pleurs.

 

                  Madame L.C. a prŽsentŽ de nouveau un Žpisode de reviviscence avec des pensŽes Ē flash back Č.

Elle demeure irritable, Žvite toujours de parler dÕaccident.

 

 

6 Š Six mois aprs lՎvnement (un mois et demi aprs le dŽcs)

 

                  Sur le plan somatique, une fatigue est signalŽe par presque tous les membres de la famille.

 

                  Chez Madame Z.M.., Žpouse du dŽfunt, on note une disparition des plaintes somatiques (douleurs plantaires) et de lÕinsomnie.

Elle demeure irritable avec accs de colre.

 

                  Chez Madame Y.B., on note une pŽriode dÕanorexie et un Žpisode dŽpressif avec dŽsorganisation sociale et impossibilitŽ dÕassurer son r™le familial.

 

                  Chez Madame A.K., on note un Žpisode dŽpressif dont le facteur dŽclenchant a ŽtŽ une violente dispute avec sa mre. Elle a prŽsentŽ un abaissement de lÕintŽrt et du sentiment de soi avec perte de lÕestime, autoreproches, idŽes dÕinutilitŽ et de culpabilitŽ.

Elle se sentait orpheline, abandonnŽe, ce qui rŽveilla en elle un traumatisme ancien, celui de sa naissance non dŽsirŽe.

 

 

Elle tŽmoigne : Ē Je vivais un double deuil, celui de mon pre et celui de ma mre. Au moment ou jÕavais le plus besoin du soutien de celle-ci, elle me rejeta Č.

Elle signale des douleurs vives au niveau de la fosse iliaque gauche. Une consultation spŽcialisŽe et une Žchographie abdomino-pelvienne ont ŽtŽ pratiquŽes, et se sont rŽvŽlŽes sans particularitŽs.

 

 

7 Š Neuf mois aprs lՎvnement (quatre mois et demi aprs le dŽcs)

 

                  Madame L.C. Žvite toujours les conversations o il est question dÕaccident.

 

                  Madame Y.B. prŽsente des pensŽes, de faon rŽpŽtitive, de son pre, Žvite les informations traitant de violence, dÕaccidents (de la route, catastrophe naturelle).

 

                  Chez Madame A.K., on note une normalisation de lÕhumeur, la disparition de la symptomatologie dŽpressive.

Il persiste quelques brefs Žpisodes anxieux rapidement rŽsolutifs.

A noter Žgalement un Žpisode boulimique.

 

 

8 Š Douze mois aprs lՎvnement (sept mois et demi aprs le dŽcs)

 

                  A lՎvocation du pre, on note un languissement et des pleurs.

 

                  Madame A.K. et sa mre, Madame Z.M., sont irritables.

 

                  Madame Z.M., a prŽsentŽ deux Žpisodes de reviviscence, de cauchemars, accompagnŽs de dŽtresse intense.

Elle tŽmoigne : Ē Je fais des cauchemars. Sans mÕen rendre compte, je me suis retrouvŽe hors de chez moi. Je hurlais, je voyais des ambulances et des gens partout Č.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A - ELEMENTS SEMIOLOGIQUES

 

                  Les ŽlŽments sŽmiologiques que nous pouvons relever de la pŽriode allant du deuxime au douzime mois sont :

 

         - sympt™mes de reviviscence, marquŽs par un sentiment de revivre lÕexpŽrience traumatique et de souvenirs rŽpŽtitifs accompagnŽs de dŽtresse, dÕanxiŽtŽ et dÕactivation neurovŽgŽtative, observŽs surtout Madame Y.B. et Madame L.C. ; cette dernire a prŽsentŽ des attaques de panique avec :

* expŽrience de dŽpersonnalisation et dŽrŽalisation,

* peur de perdre le contr™le de soi,

* impression dՎvanouissement et de vertiges,

* oppression thoracique et impression dՎtouffement,

* tachycardie, p‰leur et nausŽes.

Episodes de reviviscence par flash back et illusion chez Madame L.C..

Hallucinations chez la mre, Madame Z.M.,

 

         - sympt™mes dՎvitement :

                  * Žvitement de place (maison) chez Madame Z.M.,

                  * Žvitement de la famille chez Monsieur N.M.,

                  * Žvitement de conversation (thmes dÕaccident) chez Madame L.C.,

                  * Žvitement dÕinformations relatant la violence, les catastrophes chez Madame Y.B.,

                  * rŽduction de lÕintŽrt et des affects chez Madame Y.B.,

                  * amnŽsie de la phase aigu‘ de lՎvnement, seulement chez Madame Y.B.,

 

         - sympt™mes de vigilance marquŽs par :

                  * des difficultŽs de concentration chez Madame L.C. et Madame Y.B. ; cette dernire prŽsente aussi des troubles mnŽsiques,

                  * une irritabilitŽ chez Madame L.C., Madame Y.B. et leur mre, Madame Z.M., avec accs de colre retrouvŽs chez cette dernire,

 

         - manifestations dŽpressives :

* liŽes au travail de deuil,

                  * deuil compliquŽ avec dŽpression sŽvre chez Madame A.K. et Madame Y.B.,

                  * dŽpression du post-partum chez la mre (ˆ la naissance de la fille A.K.) ?

 

 

 

         - plaintes somatiques multiples :

                  * douleurs ostŽo-articulaires rapportŽes par Madame Z.M. (la mre),

                  * douleurs abdomino-pelviennes rapportŽes par Madame Y.B. et Madame A.K.,

 

         - anorexie, boulimie.

 

                  A partir de la sŽmiologie clinique, nous pouvons avancer le diagnostic dÕE.S.P.T. chez Madame Y.B., Madame L.C. et la mre, Madame Z.M., diagnostic que nous allons essayer dՎtayer par des outils dՎvaluation.

 

 

B Š QUESTIONNAIRE DÕAUTO-EVALUATION

 

                  Ils ont ŽtŽ rŽalisŽs retrospectivement six mois aprs lՎvŽnement (un mois et demi aprs le dŽcs).

1 - Q.E.D.P. (Questionnaire sur les expŽriences de dissociation pŽritraumatique) (19).

 

                  Il mesure lÕintensitŽ de lՎtat dissociatif au cours de lՎvnement traumatitique et, dÕaprs MARMAR et WEISS (1997), la dissociation est lÕun des meilleurs indicateurs de stress aigu et un excellent prŽdicateur dÕun E.S.P.T..

 

                  Les scores obtenus chez toute la famille dŽpassent le Ē seuil clinique Č fixŽ ˆ 15.

 

                  Il est trs significatif chez Madame Y.B. (non tŽmoin de lÕaccident), chez Madame L.C. et lՎpouse du dŽfunt, Madame Z.M. (tŽmoin de lÕaccident).

 

                  Nous dŽduisons, restropectivement, ˆ partir de ces scores que Madame Y.B., Madame L.C. et Madame Z.M.. avaient prŽsentŽ des troubles dissociatifs trs significatifs, prŽdicateurs du dŽveloppement dÕun E.S.P.T..

 

 

 

 

 

 

 

2 - I.E.S.R. (Impact of Event Scale-Revised) (19)

 

                  Cet instrument de mesure propose une Žvaluation de lÕE.S.A. et de lÕE.S.P.T..

 

                  Le Ē seuil clinique Č proposŽ par lÕE.S.A. est fixŽ ˆ un score total de 22, celui de lÕE.S.P.T. ˆ 36.

 

         - le score obtenu chez toute la famille dŽpasse le seuil clinique fixŽ pour lÕE.S.A.,

 

         - pour lÕE.S.P.T. :

                  * (1) il est significatif chez Madame F.Z. (42), Madame A.K. (44), Monsieur N.M. (46),

                  * (2) il est trs significatif chez Madame Y.B. (56), Madame L.C. (68), Madame Z.M. (70),

 

                  LÕinterprŽtation de ces scores suggre donc la prŽsence dÕun trouble de stress post-traumatique chez les premiers (1) et chez les seconds (2), mais de faon trs prononcŽe chez ces derniers (Madame Y.B., Madame L.C., Madame Z.M.).

 

CONCLUSION

 

         a) - La sŽmiologie clinique du 2e au 12e mois nous a permis dÕavancer le diagnostic dÕE.S.P.T. chez Madame Y.B., Madame L.C. et Madame Z.M. (la mre).

 

         b) Les questionnaires dÕauto-Žvaluation rŽalisŽs restrospectivement (six mois aprs lՎvnement) et leurs interprŽtations ˆ partir des scores obtenus, ont permis :

 

         - dÕune part, ˆ partir du Q.E.D.P., de nous renseigner sur les troubles dissociatifs prŽdicateurs dÕE.S.P.T. chez Madame Y.B., Madame L.C. et Madame Z.M., la mre,

 

         - et dÕautre part, ˆ partir de lÕI.E.S.R., de nous renseigner sur la prŽsence de troubles de stress post-traumatique chez Madame F.Z., Madame A.K., Monsieur N.M., mais nettement plus significatifs chez Madame Y.B., Madame L.C., Madame Z.M., la mre.

 

                  Nous pouvons donc en dŽduire que, compte-tenu de la sŽmiologie et des questionnaires dÕauto-Žvaluation, les personnes qui prŽsentent un E.S.P.T. sont Madame Y.B., Madame L.C., Madame Z.M. (la mre).

 

 

         c) - Les rŽsultats obtenus dans lՎtude de sympt™mes des critres diagnostiques de lÕE.S.A. a partir des deux paramtres (intensitŽ des sympt™mes et scores des sympt™mes) ont montrŽ que les sympt™mes aigus Žtaient importants et vŽcus intensŽment par :

 

         - Madame Y.B. : (intensitŽ = 10 ; sympt™mes = 14),

         - Madame L.C. : (16 Š 11),

         - Madame Z.M., la mre : (15-12).

 

                  LÕhypothse posŽe Žtait : plus les sympt™mes aigus Žtaient importants et vŽcus intensŽment, plus ils prŽdisent ˆ long terme le dŽveloppement ultŽrieur dÕun E.S.P.T..

 

                  Comme elles ont dŽveloppŽ un E.S.P.T., nous pouvons dire que lÕimportance des scores et leur vŽcu intense prŽdisposent ˆ la psychopathologie (E.S.P.T).

(Et ceci indŽpendamment de leur personnalitŽ et de leur tempŽrament).

 

                  Nous rappelons que :

         - Madame Y.B. prŽsentait des traits de personnalitŽ introvertie,

         - Madame L.C., des traits de personnalitŽ extravertie,

         - Madame Z.M., des traits de personnalitŽ extravertie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

QUESTIONNAIRE SUR LES EXPERIENCES

DE DISSOCIATION PERI-TRAUMATIQUE (Q.E.D.P.)

 

Q.E.D.P. rŽcapitulatif de toute la famille, rŽalisŽ rŽtrospectivement six mois aprs lՎvnement traumatique.

 

                                                                                1 : Pas du tout vrai

2 : Un peu vrai

3 : Plut™t vrai

4 : Trs vrai

5 : Extrmement vrai

 

 


FAMILLE

 

 

QUESTIONNAIRE

 

NON TEMOINS

TEMOINS

 

DIRECTS

 

F.M.

1er

 

F.Z.

2e

 

A.K.

3e

 

Y.B.

4e

 

F.L.

5e

 

L.C.

6e

 

N.M.

7e

MERE

1. Il y a eu des moments o jÕai perdu le fil de ce qui se passait Š jՎtais compltement dŽconnectŽ(e) ou, dÕune certaine faon, jÕai senti que je ne faisais pas partie de ce qui se passait.

 

2

 

4

 

2

 

5

 

2

 

5

 

4

 

5

2. Je me suis retrouvŽ(e) sur le Ē pilote automatique Č - je me suis mis(e) ˆ faire des choses que, je lÕai rŽalisŽ plus tard, je nÕavais pas activement dŽcidŽ de faire.

 

3

 

4

 

4

 

5

 

3

 

4

 

2

 

5

3. Ma perception du temps a changŽ Š les choses avaient lÕair de se dŽrouler au ralenti.

2

2

1

4

1

4

3

1

4. Ce qui se passait me semblait irrŽel, comme si jՎtais dans un rve, ou au cinŽma, ou en train de jouer un r™le.

 

4

 

5

 

5

 

5

 

5

 

5

 

4

 

5

5. CÕest comme si jՎtais le ou la spectateur(trice) de ce qui mÕarrivait, comme si je flottais au dessus de la scne et lÕobservais de lÕextŽrieur.

 

1

 

1

 

1

 

5

 

1

 

5

 

1

 

3

6. Il y a eu des moments o la perception que jÕavais de mon corps Žtait distordue ou changŽe. Je me sentais dŽconnectŽ(e) de mon propre corps, ou bien il me semblait plus grand ou plus petit que dÕhabitude.

 

 

1

 

 

1

 

 

1

 

 

5

 

 

1

 

 

4

 

 

1

 

 

3

7. JÕavais lÕimpression que les choses qui arrivaient aux autres mÕarrivaient ˆ moi aussi Š comme par exemple tre en danger alors que je ne lՎtais pas.

 

4

 

5

 

5

 

4

 

4

 

5

 

2

 

5

8. JÕai ŽtŽ surpris(e) de constater aprs coup que plusieurs choses sՎtaient produites sans que je mÕen rende compte, des choses que jÕaurais habituellement remarquŽes.

 

1

 

1

 

1

 

5

 

1

 

3

 

2

 

4

9. JՎtais confus(e) ; cÕest-ˆ-dire que par moment, jÕavais de la difficultŽ ˆ comprendre ce qui se passait vraiment.

 

2

 

4

 

3

 

5

 

2

 

4

 

3

 

5

10. JՎtais dŽsorientŽ(e) ; c'est-ˆ-dire que par moment, jՎtais incertain(e) de lÕendroit o je me trouvais, ou de lÕheure quÕil Žtait.

 

1

 

3

 

3

 

5

 

1

 

4

 

2

 

5

                                                        

                                           SCORES

 

 

21

 

30

 

26

 

48

 

20

 

43

 

24

 

41

 

 

 

 

 

 

 

ECHELLE DÕIMPACT DE LÕEVENEMENT REVISEE (I.E.S.R.)*

 

I.E.S.R. rŽcapitulatif de toute la famille, rŽalisŽ rŽtrospectivement six mois aprs lՎvnement traumatique)

                                                                                         0 : Pas du tout

1 : Un peu

2 : Moyennement

3 : Passablement

4 : Extrmement

 

 


FAMILLE

 

DIFFICULTES EPROUVEES

AU COURS DES 7 JOURS SUIVANT

LÕEVENEMENT

 

NON TEMOINS

TEMOINS

 

DIRECTS

F.M.

1er

F.Z.

2e

A.K.

3e

Y.B.

4e

F.L.

5e

L.C.

6e

N.M.

7e

MERE

1. Tout rappel de lՎvnement ravivait mes sentiments en rapport avec celui-ci.

2

2

3

4

2

4

4

4

2. Je me rŽveillais la nuit.

2

2

3

4

2

4

1

4

3. DiffŽrentes choses me faisaient y penser.

3

2

3

3

3

4

4

4

4. Je me sentais irritable et en colre.

3

2

3

3

3

4

2

4

5. Quand jÕy repensais ou quÕon me le rappelait, jՎvitais de me laisser bouleverser.

0

0

0

0

0

1

0

1

6. Sans le vouloir, jÕy repensais.

4

4

4

4

3

4

4

4

7. JÕavais lÕimpression que rien nՎtait vraiment arrivŽ ou que ce nՎtait pas rŽel.

3

4

4

4

4

4

3

4

8. Je me suis tenu loin de ce qui me faisait y penser.

0

0

0

1

0

3

3

3

9. Des images de lՎvnement surgissaient dans ma tte.

1

3

3

2

1

4

4

4

10. JՎtais nerveux et je sursautais facilement.

1

3

3

4

1

4

1

4

11. JÕessayais de ne pas y penser.

0

0

0

0

0

0

0

1

12. JՎtais conscient dÕavoir encore beaucoup dՎmotions ˆ propos de lՎvnement, mais je nÕy ai pas fait face.

3

1

2

0

0

0

2

3

13. Mes sentiments ˆ propos de lՎvnement Žtaient comme figŽs.

1

4

4

4

2

4

1

4

14. Je me sentais et je rŽagissais comme si jՎtais encore dans lՎvnement.

1

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3

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2

4

4

4

15. JÕavais du mal ˆ dormir.

3

4

4

4

3

4

1

4

16. JÕai ressenti des vagues de sentiments intenses ˆ propos de lՎvnement.

2

3

3

4

2

4

4

4

17. JÕai essayŽ de lÕeffacer de ma mŽmoire.

0

0

0

0

0

1

0

1

18. JÕavais du mal ˆ me concentrer.

2

3

2

4

1

4

3

3

19. Ce qui me rappelait lՎvnement me causait des rŽactions physiques telles que des sueurs, des difficultŽs ˆ respirer, des nausŽes ou des palpitations.

1

0

1

3

0

4

1

4

20. JÕai rvŽ ˆ lՎvnement.

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0

0

1

0

3

2

2

21. JՎtais aux aguets et sur mes gardes.

1

3

2

3

1

4

2

4

22. JÕai essayŽ de ne pas en parler.

0

0

0

0

0

0

0

0

                                                        

                                           SCORES

 

 

33

 

42

 

44

 

56

 

30

 

68

 

46

 

 

70

 

* (CITEE LE PLUS SOUVENT SOUS SON NOM ANGLAIS : Impact of Event Scale-Revised)

 

 

 

 

RESUME

CONSEQUENCES A MOYEN ET A LONG TERME

 

 

 

 

 

CONSEQUENCES

A MOYEN TERME

(du 2e au 5e mois)

 

CONSEQUENCES

A LONG TERME

(du 6e au 12e mois)

 

SOMATIQUE

 

- Fatigue

- Douleurs ostŽo-articulaires (mre)

- Douleurs abdomino-pelviennes (YB)

- Fatigue

- Disparition des plaintes somatiques (mre et YB)

- Douleurs abdomino-pelviennes chez AK

 

 

 

AFFECTIF

 

- Phase de travail de deuil :

* pŽriodes de languissement de lՐtre cher, accompagnŽes parfois de pleurs et dŽtresse,

* sentiment de vide et de perte des repres,

* anhŽdonie, tristesse,

* anxiŽtŽ,

* accs de colre.

-

- Evocation du pre et languissement,

- RŽduction de lÕaffectivitŽ chez AK et YB,

- IrritabilitŽ et accs de colre.

 

PSYCHOLOGIQUE

ET

PSYCHIATRIQUE

 

- Anorexie/Boulimie

- AnxiŽtŽ

- E.S.P.T. (Madame L.C., Madame Y.B., Madame Z.M., la mre)

- DŽpression chez A.K. et Y.B.(*), puis stabilisation de lÕhumeur au 9e mois,

- E.S.P.T. partiellement rŽsolu chez YB, LC et mre.

 

FONCTIONNEMENT

 

- DŽsorganisation sociale, intrafamiliale et professionnelle

- Modification de la vision, de la vie, du monde et remise en question des valeurs fondamentales,

- DŽsorganisation familiale

(*) DŽpression : chez Mme Y.B. et Mme A.K. : la 1re nous a livrŽ peu dՎlŽments de son ressentit dŽpressif. Chez Mme A.K. on note un dŽsintŽret total, dŽvalorisation,idŽes de culpabilitŽs et dÕautorepproches,idŽes dÕinutilitŽs,fatigue,anorexie,douleurs pelviennes.

La depression de Mme A.K. peut etre interprŽtŽe comme suit :

Il existe un facteur de vulnŽrabilitŽ chez celle-ci liŽ probablement ˆ une carence de soin maternel(depression de la mre) la prŽdisposant ainsi ˆ la depression actuelle survenue ˆ lÕoccasion de lՎvnement traumatique et au travail de deuil.

A ce sujet M.F. BacquŽ souligne que le deuil est une sŽparation qui rŽactive toutes les pertes antŽrieures, son bon dŽroulement dŽpend de la faon dont elles ont pu etre vŽcues,tolŽrŽes et intŽgrŽes. Le deuil est un facteur non nŽgligeable dans la dŽcompensation depressive morbide(20).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA REACTION DE DEUIL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  Le deuil est dŽfini comme la perte dÕun tre aimŽ proche et significatif.

 

                  Le deuil est une expŽrience quasi universelle ˆ laquelle sont confrontŽs, un jour ou lÕautre, la plupart des individus.

 

                  Il occupe le premier rang dans toutes les Žchelles des Žvnements de vie.

 

                  Dans le S.R.S.S. de HOLMES et RAPHE (1967), la mort du conjoint est au premier rang, le dŽcs dÕun parent proche au cinquime.

 

                  Le deuil est source de stress et de souffrance psychique, mettant ˆ lՎpreuve les dŽfenses et les ressources personnelles dÕadaptation, rŽvŽlant les vulnŽrabilitŽs individuelles.

 

                  Le travail de deuil correspond ˆ une pŽriode o les sympt™mes dŽpressifs, anxieux et traumatiques sont classiquement considŽrŽs comme non pathologiques dans la mesure o ils sont transitoires et spontanŽment rŽsolutifs.

 

                  Les Žtudes systŽmatisŽes rŽcentes ont permis de prŽciser lÕhistoire naturelle de deuil dans la population gŽnŽrale, les particularitŽs de chaque deuil selon la personne dŽcŽdŽe, les circonstances de la mort, la personnalitŽ de lÕendeuillŽ, lÕentourage socio-familial (10) et, selon le contexte socio-culturel dont les Žtudes anthropologiques ont apportŽ de nombreuses descriptions des processus et rituels de deuil (10).

 

                  Il faut rappeler que les travaux modernes sur le deuil ont commencŽ avec le trs cŽlbre article de S. FREUD : Ē Deuil et mŽlancolie Č (1915-1917). Depuis lors, les trs nombreuses contributions dÕinspiration psycho-dynamique ont reposŽ sur le texte fondateur (10).

 

                  Lorsque lÕon parle de rŽaction de deuil, il est fait rŽfŽrence ˆ un processus qui assure trois fonctions :

 

         - premirement, le deuil peut tre peru comme une fonction dÕexpression sociale des rŽactions de chagrin suite ˆ un dŽcs,

         - deuximement, le deuil peut remplir une fonction dÕadaptation qui sert ˆ gŽrer le stress induit par la mort,

 

- troisimement, le deuil peut Žgalement assurer une fonction de transformation des r™les sociaux, ce qui est devenu nŽcessaire pour lÕadaptation des endeuillŽs ˆ la nouvelle rŽalitŽ dans laquelle ils auront ˆ Žvoluer suite au dŽcs.

 

                  Plusieurs auteurs ont tentŽ de dŽcrire et de conceptualiser les fonctions du deuil et la manire dont les personnes cheminent ˆ travers le processus de deuil.

 

                  La perception du travail de deuil varie en fonction de la perception thŽorique que lÕon adopte, mais elle varie Žgalement en fonction des transformations historiques qui sÕoprent ˆ lÕintŽrieur dÕun mme cadre thŽorique.

 

ETAPES ET TRAVAIL DE DEUIL

 

                  Le processus de deuil est un processus dynamique. Il ne sÕagit pas dÕun cheminement dont lÕordre et la sŽquence sont linŽaires.

 

                  La pŽriode de rŽsolution peut sՎtendre de plusieurs mois ˆ quelques annŽes (11).

 

                  Il existe actuellement un relatif consensus pour la description du dŽroulement des processus de deuil.

 

                  On fait gŽnŽralement remonter ˆ J. BOWLBY et C.M. PARKES (1970) la premire description cohŽrente des phases de deuil (12) :

 

         - la phase dÕengourdissement qui dure de quelques heures ˆ une semaine,

 

         - la phase de languissement et de recherche de la personne perdue pendant quelques mois, parfois des annŽes,

 

         - la phase de dŽsorganisation et de dŽsespoir,

 

         - la phase de plus ou moins grande rŽorganisation.

 

 

 

 

 

 

 

                  Tous les auteurs distinguent trois Žtapes dans le dŽroulement dÕun deuil :

 

         - les premiers moments,

 

         - lՎtape centrale avec Žtat dŽpressif et travail de deuil,

 

         - la fin du deuil.

 

                  SILVERMAN (1961), C.M. PARKES (1970, 1972), P. CLAYTON (1973), S. ZISOOK et All (1983), sur la base de leurs Žtudes systŽmatiques des veufs et veuves, donnent la description suivante :

 

1 Š La phase dÕimpact et hŽbŽtude, qualifiŽe de pŽriode de choc pendant laquelle la stupŽfaction et la torpeur peuvent durer de quelques heures ˆ quelques jours, parfois quelques semaines (plus dÕune semaine seulement chez les femmes parentes dÕune personne dŽcŽdŽe brutalement selon LEVY (1976)).

Pendant cette phase, lÕendeuillŽ est engourdi, agit de faon automatique.

 

2 Š La phase de dŽpression et de repli que C.M. PARKES divise en deux temps, regret nostalgique et protestation, dŽsorganisation.

Cette phase dure entre plusieurs semaines ˆ un an.

La dŽpression avec irritabilitŽ et agitation est au premier plan.

On dŽcrit aussi des vagues dՎmotion aigu‘, dÕaffects intenses avec souvent malaises somatiques, retrait social et obsession par lÕimage et le souvenir du dŽfunt.

 

3 Š La phase de rŽcupŽration, guŽrison, restitution.

LÕacceptation du dŽcs sÕaccompagne dÕune guŽrison avec rŽtablissement des intŽrts habituels, de lÕaptitude au plaisir, avec dŽsir de nouvelles relations.

Les endeuillŽs ont souvent lÕimpression que le monde et leur vie ont quelque peu changŽ aprs cette perte.

                  S. ZISOOK, en 1987, donne une description des Žtapes de deuil par :

 

1 Š Choc, dŽni et incrŽdulitŽ :

Le dŽni, dans cette phase, caractŽrise les rŽactions de deuil visant en outre ˆ retarder lՎchŽance de la perte.

Il se caractŽrise par un Žtat de torpeur ou dÕengourdissement Žmotif.

Cette implication affective permet ˆ lÕendeuillŽ de se protŽger contre les Žmotions qui sont alors envahissantes (11).

 

 

2 Š Deuil aigu :

         * Žtat Žmotionnel intense,

         * retrait social,

         * identification au dŽfunt,

 

3 Š PŽriode de rŽsolution : acceptation de la perte.

 

 

LA DUREE DU DEUIL

 

                  Il est souvent admis que le deuil est achevŽ en un an.

 

                  La durŽe dÕun deuil normal reste controversŽe. La plupart des chercheurs estiment que la dŽtresse de sŽparation et le travail de deuil avec la dŽpression diminuent au bout de quatre ˆ six mois (12).

 

 

LES REACTIONS DÕANNIVERSAIRE

 

                  Les endeuillŽs manifestent une certaine intensification des sympt™mes, et une dŽtresse rŽelle peut sÕobserver pendant quelques jours.

 

                  Si cette exacerbation symptomatique dŽpasse les quelques jours correspondant ˆ lÕanniversaire du dŽcs, cela signifie que le deuil sÕest compliquŽ avec sympt™mes de type anxieux, sympt™mes dŽpressifs et dՎlŽments psychotraumatiques (P.T.S.D.)(12).

 

                  Il semble admis que 20 % des deuils seraient des deuils compliquŽs.

 

                  A cette date dÕanniversaire, certaines endeuillŽs cherchent aides auprs des proches et consultent leurs mŽdecins pour la prescription dÕun traitement.

 

DEUIL TRAUMATIQUE

 

                  Le critre diagnostique de ce type de deuil a ŽtŽ proposŽ en 1999, ˆ lÕoccasion dÕune confŽrence de consensus.

 

                  LÕessentiel du deuil traumatique consiste dans lÕintrication dÕun psychotraumatisme avec E.S.P.T. et dÕune angoisse de sŽparation.

 

Ces deuils sont ˆ lÕorigine de complications psychosomatiques et psychiatriques, dÕo leurs recherches systŽmatiques afin que les endeuillŽs puissent bŽnŽficier dÕun traitement appropriŽ (13).

 

                  Pour le diagnostic du deuil traumatique, H.G. PRIGERSON, M.K. SHEAR, S.C. JACOB et All ont convenu comme critre :

 

         - sympt™mes de dŽtresse de sŽparation :

 

                  * pensŽes intrusives concernant le dŽfunt,

                  * dŽsir intense de sa prŽsence,

                  * recherche de cette personne disparue,

                  * sentiment intense de solitude,

 

         - sympt™mes de dŽtresse traumatique :

 

                  * perte de projet pour lÕavenir et sentiment de futilitŽ concernant le futur,

                  * sentiment dÕobscurcissement, de dŽtachement et dՎmoussement des affects,

                  * impossibilitŽ dÕadmettre le dŽcs,

                  * sentiment de vide et dÕabsurditŽ,

                  * sentiment quÕune partie de soi est morte,

                  * Žclatement du monde avec une perte du sentiment de sŽcuritŽ, de confiance et de contr™le,

                  * irritabilitŽ excessive ou colre pour tout ce qui concerne la mort(13).

 

 

CRITERES DE DUREE

 

                  Ces sympt™mes vont durer pendant au moins deux mois.

 

                  Il nÕy a pas, pour lÕinstant, de critres de dŽlai dans lÕapparition du syndrome qui peut donc tre retardŽ par rapport au stress initial liŽ au dŽcs.

 

                  En effet, cet ensemble de critres doit faire lÕobjet de nouvelles validations.

Les Žtudes permettront de prŽciser quel est le moment optimal dՎvaluation (plusieurs mois aprs le dŽcs), et quel est le critre de durŽe de persistance des troubles (13).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

APPROCHE CULTURELLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  Aucune sociŽtŽ traditionnelle, aussi Ē archa•que Č soit-elle, n'abandonne ses morts sans sŽpulture ni rites. Ceux-ci sont destinŽs ˆ assurer au dŽfunt un parcours posthume favorable, et ˆ protŽger la communautŽ de rŽsidus psychiques indŽsirables.

 

                  Les modalitŽs de rites varient souvent, moins en fonction des peuples et des Žpoques que de lÕappartenance sociale, sachant quÕune sociŽtŽ traditionnelle est toujours hiŽrarchisŽe fonctionnellement en castes (21).

 

                  En Islam, au moment de lÕagonie, le mourant est orientŽ vers la direction rituelle de la prire (en arabe, la qibla, direction de la Mecque).

 

                  Il doit sÕefforcer de tŽmoigner de lÕunitŽ de Dieu jusquՈ ses extrmes possibilitŽs. SÕil est trop faible, un proche lui lve lÕindex de la main droite et prononce pour lui, ˆ son oreille, ˆ voix basse, la formule qui tŽmoigne la foi de lÕIslam (en arabe, tawhid) : Ē Mon Dieu, pardonne ˆ É et place le ˆ un rang ŽlevŽ, parmi ceux qui ont ŽtŽ guidŽs. Sois son remplaant auprs des membres de sa famille qui sont demeurŽs en vie. Pardonnes-nous, ainsi quՈ lui, ™ Ma”tre des Mondes, et fais de sa tombe un endroit spacieux et lumineux Č (22).

 

 

1 Š Coutumes et rites dÕoblations

 

                  En latin, oblatio signifie offrir.

 

                  Les Ē procŽdures oblatives Č concernant le dŽfunt, ont pour objet sa prŽparation en vue du voyage posthume qui lÕattend, et sa confrontation avec le monde des morts.

 

         - La toilette mortuaire (en arabe ghusl) : le dŽfunt doit tre en Žtat de puretŽ rituelle.

Aussi procde-t-on pour lui aux mmes ablutions que celles requises pour les prires coraniques.

LÕeau de toilette peut tre additionnŽe de lotus et de camphre.

On parfume et on oint le dŽfunt ˆ lÕaide dÕencens et dÕaromates, particulirement sur le front, les paumes des mains, les genoux et la plante des pieds (22).

En Islam, la thanatopraxie est prohibŽe.

On vt le dŽfunt dÕune tunique, puis on le couvre dÕune Žtoffe blanche.

Tout nĻud serrŽ est proscrit.

Les linceuls peuvent tre multiples, mais en nombre impair (3,5,7).

 

         - La veillŽe funbre : elle alterne prires, silence, paroles dÕencouragement et de consolation des endeuillŽs.

Elle consiste ˆ la rŽcitation de versets coraniques.

Certaines familles font appel ˆ des pleureuses (coutume tombŽe en dŽsuŽtude).

Pendant la veillŽe, des bougies sont allumŽes, les miroirs et les portraits sont voilŽs.

 

         - Les funŽrailles : pour la plupart des maghrŽbins, le dŽfunt est ramenŽ et inhumŽ dans son pays dÕorigine, dans sa ville ou village natal, avec ses anctres.

En Islam, la h‰te de lÕinhumation est recommandŽe ; selon Hadith prothŽtique (parole rŽvŽlŽe) : Ē H‰tez les funŽrailles ! SÕil sÕagit dÕune personne pieuse, cÕest un service que vous lui rendez. Si elle ne lÕest pas, vous soulagez vos Žpaules dÕun fardeau malfaisant Č.

Il demande aux hommes dÕy participer jusquՈ lÕensevelissement, avec Ē foi et rŽsignation Č.

Il convient de souligner le contraste entre le prŽcepte traditionnel et le concept moderne qui contraint ˆ des dŽlais de plus en plus prolongŽs pour lÕinhumation des dŽfunts, notamment en raison de complications administratives.

Un certain nombre de prires sont dites lorsque le corps est placŽ rituellement dans la fosse.

 

         - Le repas funŽraire : le soir de lÕenterrement, il est de tradition quÕun repas soit offert aux proches, aux voisins, aux pauvres.

Ce repas est accompagnŽ dÕune rŽcitation nocturne du coran. On dit que cela enlve la terre qui aurait pu entrer dans la bouche du dŽfunt.

 

 

2 Š DurŽe du deuil

 

                  En Islam, la durŽe du deuil est de quarante jours. Le nombre 40 indique un changement dՎtat de lՐtre, rŽduit ˆ une quasi virtualitŽ. A ce titre, il symbolise le passage Žtroit de la mort ˆ la vraie vie.

                  Les quarante jours consŽcutifs au dŽcs sont un temps de solitude et de pŽnitence, avant la renaissance annoncŽe.

 

                  Chez les musulmans, quarante jours aprs la mort, une prire communautaire est dite, consistant en la rŽcitation de sourates coraniques.

 

                  On observe que la valeur numŽrique de la lettre nasale Ē m Č (en arabe m”m), initial du mot Ē mort Č (en arabe mawt) est 40. La forme graphique de cette lettre reprŽsente, dÕaprs RenŽ GUENON, Ē lՐtre compltement repliŽ sur lui-mme Č (21).

 

                  Les funŽrailles ont une importance fondamentale pour les proches pour pouvoir commencer le travail du deuil. Car qui dit funŽrailles dit certitude que le proche est mort. La certitude que la mort est bien Žtablie est aussi et surtout la condition nŽcessaire ˆ lÕentrŽe dans le travail de deuil.

 

 

3 Š Les rites funŽraires

 

                  Ils sont toujours articulŽs autour des mmes invariants anthropologiques, dŽsagrŽgation, agrŽgation (Jean-Paul GUETRY).

 

                  AujourdÕhui, dans le monde moderne, les rites funŽraires sont singulirement dŽpouillŽs de leur apparat de jadis.

 

                  Dans la religion musulmane, le deuil est collectif.

 

                  Aucun musulman nÕest censŽ mourir isolŽ, sans prise en charge de sa famille par la communautŽ, le concept fondateur Žtant la UMMA (communautŽ des croyants) (23).

 

                  Dans la communautŽ maghrŽbine, une grande solidaritŽ culturelle, renforcŽe par le dŽracinement, est organisŽe autour de la famille :

         - offrandes (sucre, cafŽ),

         - repas prŽparŽ par les voisins et amis,

         aide financire et dŽmarches prises en charge par la communautŽ.

                  Dans la communautŽ algŽrienne, en particulier les algŽriens de la rŽgion orannaise, ˆ la fin du repas funŽraire, les hommes organisent une collecte dÕargent qui sera remis ˆ la famille endeuillŽe.

 

                  Cette collecte aidera ˆ supporter les frais des funŽraires.

 

                  Cette pratique communautaire, par lÕaide et le soutien quÕelle apporte, contribue ˆ apaiser la douleur et consolide la communautŽ.

 

                  LorsquÕune famille est gravement traumatisŽe par la perte dÕun proche dans une catastrophe (accident de la route, etcÉ), le deuil collectif permet le maintien dÕune ouverture suffisante ˆ la communication et aux Žchanges, une attention suffisante accordŽe par chacun au sein de la famille ˆ la souffrance des autres, en particulier celle des enfants qui nÕest pas toujours visibles (24).

 

                  Nous retiendrons plus spŽcifiquement et particulirement, deux ŽlŽments :

 

         - la capacitŽ ˆ parler du dŽfunt, ˆ le maintenir prŽsent dans les Žchanges et dans les mŽmoires, mais ˆ sa place, cÕest ˆ dire une place qui appartient au passŽ et nÕenvahit pas trop le prŽsent et lÕavenir (24),

 

         - la capacitŽ ˆ ritualiser suffisamment la perte, par un puissant soutien au travail de deuil, pour chacun et pour lÕensemble familial, ainsi que par les rituels destinŽs ˆ reconna”tre et ˆ pleurer la perte.

 

                  Les funŽrailles constituent un vŽritable carrefour psychosocial du deuil (BACQUE, 1997 Š b). En donnant lÕautorisation de pleurer le dŽfunt, elles valident sa mort et permettent au groupe dÕautoriser le signalement des endeuillŽs afin quÕils soient protŽgŽs pendant le temps de leur affaiblissement (25).

 

                  Il nÕy a pas si longtemps, et encore aujourdÕhui dans les traditions maghrŽbines, on pleure ostensiblement, on se griffe le visage, on se tape la poitrine. On pourrait penser ˆ des Ē crises dÕhystŽrie Č, mais ce nÕest pas le cas.

 

                  LÕIslam condamne et refuse ses marques ostentatoires, cela est presque un blasphme. Bien sžr, il faut pleurer le mort, mais dignement, en silence.

 

                  En Islam, la notion de destinŽe et de fatalitŽ est prŽsente. La destinŽe de tout un chacun est Žcrite. Elle indique la trajectoire de la vie ds la naissance jusquՈ la mort. Elle est ainsi tracŽe selon la volontŽ de Dieu, auquel le croyant se soumet et accepte.

 

                  Le destin, lÕheure de la mort, sont Žcrits. On dit en arabe, cÕest le MEKTOUB.

 

                  Le fait de penser que cÕest la volontŽ divine aide ˆ mieux accepter lÕidŽe de la mort et ˆ prendre conscience du caractre universel et irrŽversible de celle-ci (cela est vrai aussi dans dÕautres religions).

 

                  Un musulman convaincu, pour lui, la mort nÕest pas une fin en soi, ce nÕest que la fin dÕune vie terrestre. La vie dans lÕau-delˆ, la Ē vie Žternelle Č continue auprs de Dieu et le dŽfunt repose en paix dans un monde meilleur.

 

 

 

                  Pendant la phase mortem et post-mortem, les prires, les paroles dites par lÕImam ou Taleb (aum™nier chez les chrŽtiens et rabbin chez les juifs) ont une importance capitale, apaisent et apportent un rŽconfort aux endeuillŽs. Elles permettant aux individus, au groupe de vivre mieux les doutes et les incertitudes que gŽnre une catastrophe.

 

                  Les funŽrailles collectives permettent dՐtre pris en charge, dՐtre soutenu. Ils Ē obligent Č les endeuillŽs ˆ donner une sŽpulture dŽcente.

 

                  Dans le deuil post-traumatique, la perte dÕun proche dans un contexte traumatique augmente lՎtat de sidŽration qui conduit gŽnŽralement au Ē blocage Č du processus de deuil, traduit le refus de la perte. Les jours qui suivent vont se dŽrouler sous le signe de lÕautopersuasion de la mort de lՐtre chŽri. Elle se heurte elle-mme ˆ la tendance naturelle qui consiste ˆ se rŽfugier dans le passŽ pour Žviter de penser ˆ la perte actuelle. Seule le rite social des funŽrailles va Ē dŽbloquer Č cette situation et permettre au sujet dÕentrer dans le travail du deuil(24).

 

                  A ce sujet, pour le fils unique du dŽfunt, Monsieur N.M. qui, au dŽbut, dŽniait la mort de son pre, ce fut un dŽchirement de voir le corbillard prendre le chemin de lÕaŽroport. Pour lui Š ainsi que pour toute la famille -, il avait Ē perdu Č son pre, Ē parti dans le nŽant Č. Monsieur N.M. nÕa jamais ŽtŽ en AlgŽrie. Ce nÕest quÕune fois quÕil a enterrŽ son pre dans sa terre natale prs de ses anctres, quÕil a trouvŽ lÕapaisement, ses racines et son histoire. Monsieur N.M. savait o son pre reposait. Ce nՎtait plus abstrait. Il savait o il pouvait se recueillir.

 

                  Le fait quÕil ait visualisŽ le rite funŽraire lui a permis de se Ē dŽbloquer Č et de commencer le travail de deuil.

 

                  Dans lÕIslam, le dŽfunt doit tre enterrŽ le jour mme. De par leur dŽracinement, les maghrŽbins doivent entamer des dŽmarches pour pouvoir enterrer le dŽfunt dans son pays natal. Cela prend du temps et cÕest lˆ que la communautŽ maghrŽbine parle de la mort nostalgique, la mort de lՎxilŽ (en arabe, MUWT EL GHORBA).

Il est de tradition que le dŽfunt soit veillŽ chez lui et que des prires soient rŽcitŽes durant la nuit. Or, le dŽfunt leur est arrachŽ. La dŽpouille est maintenue ˆ la morgue, donc au froid. Cela semble contre-nature pour les proches. Ils ressentent une violence de savoir que, pendant plusieurs jours, lՐtre chŽri va demeurer dans un Ē frigo comme un vulgaire morceau de viande Č.

 

 

La famille se sent dŽpossŽdŽe de lՐtre bien aimŽ, est frustrŽe de ne pouvoir accomplir ce rite. Gr‰ce au soutien de la communautŽ, cette frustration est attŽnuŽe.

 

                  Par les croyances religieuses, les pratiques ritualisŽes et la symbiose communautaire, lÕendeuillŽ est assistŽ par sa famille, ses proches, ses amis.

 

                  Cette ambiance collective et fusionnelle faite dՎchange et dÕempathie Ē Žquivaut Č ˆ une forme de thŽrapie de groupe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CONCLUSION

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  LՎtude du cas de cette famille (par la perte de lՐtre cher) permet un certain nombre de rŽflexions sur la survenue ultŽrieure dÕun Žtat de stress post-traumatique.

 

                  Tout dÕabord, on peut constater chez cette famille une constellation symptomatique qui nous montre quÕelle a prŽsentŽ un Žtat de stress aigu, dŽpassŽ pour certains. Trois membres de cette famille ont prŽsentŽ un E.S.P.T. ce qui correspond ˆ un taux de 37.5%.

 

                  Il appara”t que la rŽaction de stress dŽpassŽe est plus souvent rŽvŽlatrice de sŽquelles chroniques.

 

                  Il est Žvident que la sŽvritŽ dÕun ŽvŽnement est difficile ˆ mesurer, ˆ quantifier ou ˆ modŽliser.

 

                  Certains aspects symptomatiques de la clinique immŽdiate prŽdisent des sŽquelles chroniques.

 

                  Ainsi, plus les sympt™mes aigus sont importants et vŽcus intensŽment, plus ils prŽdisent ˆ long terme au dŽveloppement dÕun Žtat de stress post-traumatique.

 

                  A travers cette approche dՎtudes empiriques basŽes sur des paramtres (scores sympt™mes et scores intensitŽ), nous avons essayŽ de montrer la relation de cause ˆ effet des sympt™mes aigus et du dŽveloppement dÕun Žtat de stress post-traumatique ultŽrieur, et dÕapporter ainsi une clarification modeste ˆ cette ambigu•tŽ qui ne cesse de susciter des controverses.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1)     BRESLAN et Al : citŽ par Elisabeth WEBER et Nathalie PRIETO. Nervure, NumŽro 8, tome XIII, Novembre 2000, page 10.

 

(2)           REY A. (sous la direction). Dictionnaire historique de la langue franaise. Paris, dictionnaire Ē Le Robert Č, 1998, citŽ par J.M. THURIN, stress pathologie et immunologie, page 15, Flammarion.

 

(3)           LOUIS CROCQ. Neuropsy, N” spŽcial mars 2003, pages 6, 8, 9.

 

(4)           DSM IV. Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux, 1994, pages 209 ˆ 213.

 

(5)           RICHARD A. BRYANT and ALLISON G. HARVEY. Clinical psychology review, volume 17, n” 7, pages 757, 773, 1997.

 

(6)           MICHEL DE CLERCQ et FRANCOIS LEBIGOT. Traumatismes psychiques, Ždition MASSON, pages 357-360.

 

(7)           F. LEBIGOT. La nŽvrse traumatique, la mort rŽelle et la famille originelle. Annales mŽdico-psychologiques, 1997, page 155.

 

(8)           M. DECLERCQ, F. LEBIGOT, S.A. FREEDMANN, D. BRANDES, T. PERI, SHALEV et Al :citŽ par Nathalie Prieto, Neuro-psy 2003, page 35.

 

(9)           CHRISTOPHE ANDRE. Abstract neuro-psy, 1995, n” 136, pages 1 ˆ 3.

 

(10)        MARC LOUIS BOURGEOIS. Confrontations psychiatriques ; souffrance, n” 42, page 137

 

(11)        M. SEGUIN. La formation sur le deuil aprs suicide, Nancy, octobre 2002.

 

(12)        MARC LOUIS BOURGEOIS. Confrontations psychiatriques ; souffrance, n” 42, page 147-153.

 

(13)        MARC LOUIS BOURGEOIS. Neuro-psy, numŽro spŽcial 2003, pages 79-82

 

 

(14)        L. CROCQ, C. DOUTHEAU, M. SAILHAN, M. DE CLERQ, F. LEBIGOT : citŽ par T. BIGOT, Neuropsy, numŽro spŽcial 2003, pages 27, 72.

 

(15)        A.C. MAC FARLAN, R. YEHUDA : citŽ par P. BIRMES, L. SCHMITT, neuro-psy 2003,numŽro spŽcial,pages 27, 28 et 30.

 

(16)        J.D. GUEFLI, P. BOYEN, S. CONSOLI et R.O. MARTIN, Psychiatrie, page 323.

 

(17)        B. BENSMAIL, H. BENTORKI, M. TOUARI. La dŽpression en AlgŽrie, page 143.

 

(18)        M. HANUS. Les deuils dans la vie, deuils et sŽparation chez lÕadulte et chez lÕenfant, 2e Ždition, page 103.

 

(19)        MICHEL DE CLERCQ et FRANCOIS LEBIGOT. Traumatismes psychiques, Ždition MASSON, pages 357-360.

 

(20)        MARIE FREDERIQUE BACQUE. Le deuil ˆ vivre, page 87.

 

(21)        GERARD D. CHAUVIN. Deuil et rite. Mort, volume 1, pages 58, 71, 79.

 

(22)        CHARLES ANDRE GILLES. Prire sur le dŽfunt, pages 33-63.

 

(23)        MALEK CHEBEL. Deuil et violence terroriste. Etude sur la mort, mort et deuil collectif. Esprit du temps, n” 213, 2003, page 47.

 

(24)        PATRICK CLERVOY, M. DELAGE, B. LE FUR, F. SIMON et A. LEDOUX. Deuil et guerre.Etude sur la mort.Mort et deuil collectif.Esprit du temps,page 35.

 

(25)        MARIE-FREDERIQUE BACQUE. Deuil post-traumatique et catastrophe naturelle. Etude sur la mort et deuil collectif, pages 118-128.